Ace moment, survint un vit. De superbe encolure. Il était, ma foi, fort bien mis. Et de belle tournure: "Paix, leur dit-il, taisez-vous donc. Vous faites beaucoup trop de bruit, biribi " Tout d'abord, il entra au con. Qu'il trouva un peu large, Puis dans l' trou du cul sans façon. Par trois fois, il décharge, "Hé, hé, dit-il, taisez
Victor Hugo est célèbre pour ses combats en faveur de la justice, ou plus exactement contre l'injustice celle des tribunaux comme celle de la société qui marginalise, voire criminalise les pauvres. Il est venu en aide aux condamnés, on sait à quel point il abhorrait la peine de mort cf. Claude Gueux ; Le Dernier jour d'un condamné. L'écrivain romantique a d'ailleurs préféré le chemin de l'exil après le coup d'Etat de Napoléon III, tant l'usurpation du pouvoir l'a révolté. Il n'a eu de cesse de dénoncer la tyrannie de cet usurpateur, depuis son île anglo-normande. Elu député à l'Assemblée, il a pris la défense des victimes de l'injustice ou de la misère ; selon lui, "ceux qui luttent contre l'injustice sont haïs", il affirmait ainsi "je suis haï, pourquoi ? parce que je défends les faibles, les vaincus, les petits, les enfants." Il ne mâchait pas ses mots pour parler du régime mis en place avec le 2nd Empire "ce gouvernement, je le caractérise d'un mot la police partout, la justice nulle part" et cette position idéologique transparaît dans ses romans, notamment Les Misérables. Victor Hugo n'hésite pas à évoquer ce monde injuste où certains mangent à leur faim et où d'autres doivent lutter pour obtenir une once de nourriture. Il souligne par exemple l'injustice qu'il y a à envoyer quelqu'un en prison parce qu'il avait besoin de nourrir sa famille. Jean Valjean incarne ce type d'homme, injustement condamné aux travaux forcés. La poésie dénonce aussi le sort des plus vulnérables que sont les enfants ou les femmes cf. "Mélancholia". Préface du Dernier jour d'un condamné extrait Ceux qui jugent et qui condamnent disent la peine de mort nécessaire. D'abord, – parce qu'il importe de retrancher de la communauté sociale un membre qui lui a déjà nui et qui pourrait lui nuire encore. – S'il ne s'agissait que de cela, la prison perpétuelle suffirait. À quoi bon la mort ? Vous objectez qu'on peut s'échapper d'une prison ? Faites mieux votre ronde. Si vous ne croyez pas à la solidité des barreaux de fer, comment osez-vous avoir des ménageries ? Pas de bourreau où le geôlier suffit. Mais, reprend-on, – il faut que la société se venge, que la société punisse. – Ni l'un, ni l'autre. Se venger est de l'individu, punir est de Dieu. La société est entre deux. Le châtiment est au-dessus d'elle, la vengeance au-dessous. Rien de si grand et de si petit ne lui sied. Elle ne doit pas "punir pour se venger" ; elle doit corriger pour améliorer. Transformez de cette façon la formule des criminalistes, nous la comprenons et nous y adhérons. Reste la troisième et dernière raison, la théorie de l'exemple. – Il faut faire des exemples ! il faut épouvanter par le spectacle du sort réservé aux criminels ceux qui seraient tentés de les imiter ! - Voilà bien à peu près textuellement la phrase éternelle dont tous les réquisitoires des cinq cents parquets de France ne sont que des variations plus ou moins sonores. Eh bien ! nous nions d'abord qu'il y ait exemple. Nous nions que le spectacle des supplices produise l'effet qu'on en attend. Loin d'édifier le peuple, il le démoralise, et ruine en lui toute sensibilité, partant toute vertu. Les preuves abondent, et encombreraient notre raisonnement si nous voulions en citer. Nous signalerons pourtant un fait entre mille, parce qu'il est le plus récent. Au moment où nous écrivons, il n'a que dix jours de date. Il est du 5 mars, dernier jour du carnaval. À Saint- Pol, immédiatement après l'exécution d'un incendiaire nommé Louis Camus, une troupe de masques est venue danser autour de l'échafaud encore fumant. Faites donc des exemples ! le mardi gras vous rit au nez. Victor Hugo UNE INJUSTICEAlors qu'il revient d'un dîner chez Mme de Girardin, Victor Hugo est le témoin et l'acteur d'une scène qui lui inspirera l'altercation de Fantine et de M. Bamatabois dans les H. quitta d'assez bonne heure Mme de Girardin. C'était le 9 janvier. Il neigeait à flocons. Il avait des souliers minces, et, quand il fut dans la rue, il vit l'impossibilité de revenir à pied chez lui. Il descendit la rue Taitbout, sachant qu'il avait une place de cabriolets sur le boulevard au coin de cette rue. Il n'y en avait aucun. Il attendit qu'il en faisait ainsi le planton, quand il vit un jeune homme ficelé, et cossu dans sa mise, se baisser, ramasser une grosse poignée de neige et la planter dans le dos d'une fille qui stationnait au coin du boulevard et qui était en robe fille jeta un cri perçant, tomba sur le fashionable, et le battit. Le jeune homme rendit les coups, la fille riposta, la bataille alla crescendo, si fort et si loin que les sergents de ville empoignèrent la fille et ne touchèrent pas à l' voyant les sergents de ville mettre la main sur elle, la malheureuse se débattit. Mais, quand elle fut bien empoignée, elle témoigna la plus profonde que deux sergents de ville la faisaient marcher de force, la tenant chacun par le bras, elle s’écriait - Je n'ai rien fait de mal, je vous assure, c'est le monsieur qui m'en a fait. Je ne suis pas coupable ; je vous en supplie, laissez-moi. Je n'ai rien fait de mal, bien sûr, bien sûr !Les sergents de ville lui répliquaient sans l’écouter - Allons, marche ; tu en as pour tes six mois. - La pauvre fille à ces mots Tu en as pour tes six mois, recommençait à se justifier et redoublait ses suppliques et ses prières. Les sergents de ville, peu touchés de ses larmes, la traînèrent à un poste rue Chauchat, derrière l’ H., intéressé malgré lui à la malheureuse, les suivait, au milieu de cette cohue de monde qui ne manque jamais en pareille circonstance. Arrivé près du poste, V. H. eut la pensée d'entrer et de prendre parti pour la fille. Mais il se dit qu'il était bien connu, que justement les journaux étaient pleins de son nom depuis deux jours 1 et que se mêler à une semblable affaire c'était prêter le flanc à toutes sortes de mauvaises plaisanteries. Bref, il n'entra salle où l'on avait déposé la fille était au rez-de-chaussée et donnait sur la rue. Il regarda ce qui se passait, à travers les vitres. Il vit la pauvre femme se traîner de désespoir par terre, s'arracher les cheveux ; la compassion le gagna, il se mit à réfléchir, et le résultat de ses réflexions fut qu'il se décida à il mit le pied dans la salle, un homme, qui était assis devant une table éclairée par une chandelle et qui écrivait, se retourna et lui dit d'une voix brève et péremptoire - Que voulez-vous, Monsieur ?- Monsieur, j'ai été témoin de ce qui vient de se passer ; je viens déposer de ce que j'ai vu et vous parler en faveur de cette ces mots, la femme regarda V. H., muette d’étonnement, et comme Monsieur, votre déposition, plus ou moins intéressée, ne sera d'aucune valeur. Cette fille est coupable de voies de fait sur la place publique, elle a battu un monsieur. Elle en a pour ses six mois de fille recommençait à sangloter, à crier, à se rouler. D'autres filles qui l’avaient rejointe lui disaient Nous irons te voir. Calme-toi. Nous te porterons du linge. Prends cela en attendant. » Et en même temps elles lui donnaient de l’argent et des Monsieur dit V. H., lorsque vous saurez qui je suis, vous changerez peut-être de ton et de langage et vous m' Qui êtes-vous donc, monsieur ?V. H. ne vit aucune raison pour ne pas se nommer. ll se nomma. Le commissaire de police, car c'était un commissaire de police, se répandit en excuses, devint aussi poli et aussi déférent qu'il avait été arrogant, lui offrit une chaise et le pria de vouloir bien prendre la peine de s' H. lui raconta qu'il avait vu, de ses yeux vu, un monsieur ramasser un paquet de neige et le jeter dans le dos de cette fille ; que celle-ci, qui ne voyait même pas ce monsieur, avait poussé un cri témoignant d'une vive souffrance ; qu'en effet elle s'était jetée sur le monsieur, mais qu'elle était dans son droit ; qu'outre la grossièreté du fait, le froid violent et subit causé par cette neige pouvait, en certain cas, lui faire le plus grand mal ; que, loin d'ôter à cette fille - qui avait peut-être une mère ou un enfant - le pain gagné si misérablement, ce serait plutôt l’homme coupable de cette tentative envers elle qu'il faudrait condamner à des dommages-intérêts enfin que ce n'était pas la fille qu'on aurait dû arrêter, mais l' ce plaidoyer, la fille, de plus en plus surprise, rayonnait de joie et d'attendrissement. - Que ce monsieur est bon ! disait-elle. Mon Dieu, qu’il est bon ! Mais c'est que je ne l'ai jamais vu, c'est que je ne le connais pas du tout !Le commissaire de police dit à V. H. - Je crois tout ce que vous avancez, Monsieur ; mais les sergents de ville ont déposé, il y a un procès-verbal commencé. Votre déposition entrera dans ce procès-verbal, soyez-en sûr. Mais il faut que la justice ait son cours et je ne puis mettre cette fille en liberté. - Comment ! Monsieur, après ce que je viens de vous dire et qui est la vérité - vérité dont vous ne pouvez pas douter, dont vous ne doutez pas, - vous allez retenir cette fille ? Mais cette justice est une horrible Il n'y a qu’un cas, Monsieur, où je pourrais arrêter la chose, ce serait celui où vous signeriez votre déposition ; le voulez-vous ?- Si la liberté de cette femme tient à ma signature, la V. H. femme ne cessait de dire Dieu ! que ce monsieur est bon ! Mon Dieu, qu'il est donc bon !Ces malheureuses femmes ne sont pas seulement étonnées et reconnaissantes quand on est compatissant envers elles ; elles ne le sont pas moins quand on est attribué à Adèle Hugo Melancholia extraitOù vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ;Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellementDans la même prison le même sous les dents d'une machine sombre,Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre,Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de on ne s'arrête et jamais on ne quelle pâleur ! la cendre est sur leur fait à peine jour, ils sont déjà bien ne comprennent rien à leur destin, hélas !Ils semblent dire à Dieu Petits comme nous sommes,Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! »O servitude infâme imposée à l'enfant !Rachitisme ! travail dont le souffle étouffantDéfait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, œuvre insensée,La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée,Et qui ferait - c'est là son fruit le plus certain ! -D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre,Qui produit la richesse en créant la misère,Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !Progrès dont on demande Où va-t-il ? que veut-il ? »Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,Une âme à la machine et la retire à l'homme !Que ce travail, haï des mères, soit maudit !Maudit comme le vice où l'on s'abâtardit,Maudit comme l'opprobre et comme le blasphème !O Dieu ! qu'il soit maudit au nom du travail même,Au nom du vrai travail, sain, fécond, généreux,Qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux ! Victor Hugo, Les Contemplations, Livre III Portrait de Cosette illustration des Misérables LES COMBATS DE VICTOR HUGO exemple des MisérablesCf. Lettre à LAMARTINE Témoignage de leur amitié et de leur admiration commune, cette lettre de Victor Hugo à Alphonse de Lamartine le 24 juin 1862 – parmi les cinq que le musée V. Hugo Paris conserve –, évoque les convictions et les ambitions profondes qui ont guidé la rédaction des Misérables. Mon illustre ami, Si le radical, c’est l’idéal, oui, je suis radical. Oui, à tous les points de vue, je comprends, je veux et j’appelle le mieux ; le mieux, quoique dénoncé par un proverbe, n’est pas l’ennemi du bien, car cela reviendrait à dire le mieux est l’ami du mal. Oui, une société qui admet la misère, oui, une religion qui admet l’enfer, oui une humanité qui admet la guerre, me semblent une société, une religion et une humanité inférieures, et c’est vers la société d’en haut, vers l’humanité d’en haut, et vers la religion d’en haut que je tends ; société sans roi, humanité sans frontières, religion sans livre. Oui je combats le prêtre qui vend le mensonge et le juge qui rend l’injustice. Universaliser la propriété, ce qui est le contraire de l’abolir, en supprimant le parasitisme, c'est à dire arrêter à ce but tout homme propriétaire et aucun homme maître, voilà pour moi la véritable économie sociale et politique. J’abrège et je me résume. Oui, autant qu’il est permis à l’homme de vouloir je veux détruire la fatalité humaine ; je condamne l’esclavage, je chasse la misère, j’enseigne l’ignorance, je traite la maladie, j’éclaire la nuit, je hais la haine. Voilà ce que je suis, et voilà pourquoi j’ai fait les Misérables. Dans ma pensée, les Misérables ne sont autre chose qu’un livre ayant la fraternité pour base, et le progrès pour cime. Maintenant jugez-moi. Les contestations littéraires entre lettrés sont ridicules, mais le débat politique et social entre poëtes, c'est-à-dire entre philosophes, est grave et fécond. Vous voulez évidemment, en grande partie du moins, ce que je veux ; seulement peut-être souhaitez-vous la pente encore plus adoucie. Quant à moi, les violences et les représailles sévèrement écartées, j’avoue que, voyant tant de souffrances, j’opterais pour le plus court chemin. Cher Lamartine, il y a longtemps, en 1820, mon premier bégaiement de poëte adolescent fut un cri d’enthousiasme devant votre aube éblouissant se levant sur le monde. Cette page est dans mes œuvres, et je l’aime ; elle est là avec beaucoup d’autres qui glorifient votre splendeur et votre génie. Aujourd’hui vous pensez que votre tour est venu de parler de moi ; j’en suis fier. Nous nous aimons depuis quarante ans, et nous ne sommes pas morts ; vous ne voudrez gâter ni ce passé ni cet avenir, j’en suis sûr. Faites de mon livre et de moi ce que vous voudrez. Il ne peut sortir de vos mains que de la Vieil ami Victor Hugo CHOSES VUES ouvrage posthume Hier, 22 février, j’allais à la Chambre des pairs. Il faisait beau et très froid, malgré le soleil et midi. Je vis venir rue de Tournon un homme que deux soldats emmenaient. Cet homme était blond, pâle, maigre, hagard ; trente ans à peu près, un pantalon de grosse toile, les pieds nus et écorchés dans des sabots avec des linges sanglants roulés autour des chevilles pour tenir lieu de bas ; une blouse courte et souillée de boue derrière le dos, ce qui indiquait qu’il couchait habituellement sur le pavé, la tête nue et hérissée. Il avait sous le bras un pain. Le peuple disait autour de lui qu’il avait volé ce pain et que c’était à cause de cela qu’on l’emmenait. En passant devant la caserne de gendarmerie, un des soldats y entra et l’homme resta à la porte, gardé par l’autre soldat. Une voiture était arrêtée devant la porte de la caserne. C’était une berline armoriée portant aux lanternes une couronne ducale, attelée de deux chevaux gris, deux laquais en guêtres derrière. Les glaces étaient levées mais on distinguait l’intérieur tapissé de damas bouton d’or. Le regard de l’homme fixé sur cette voiture attira le mien. Il y avait dans la voiture une femme en chapeau rose, en robe de velours noir, fraîche, blanche, belle, éblouissante, qui riait et jouait avec un charmant petit enfant de seize mois enfoui sous les rubans, les dentelles et les fourrures. Cette femme ne voyait pas l’homme terrible qui la regardait. Je demeurai pensif. Cet homme n’était plus pour moi un homme, c’était le spectre de la misère, c’était l’apparition brusque, difforme, lugubre, en plein jour, en plein soleil, d’une révolution encore plongée dans les ténèbres mais qui vient. Autrefois le pauvre coudoyait le riche, ce spectre rencontrait cette gloire ; mais on ne se regardait pas. On passait. Cela pouvait durer ainsi longtemps. Du moment où cet homme s’aperçoit que cette femme existe tandis que cette femme ne s’aperçoit pas que cet homme est là, la catastrophe est HUGO, Choses vues, 1888 Voici deux voleurs. Celui-ci est pauvre, et vole les riches. La nuit, il escalade un mur, laisse de sa chair et de son sang aux culs des bouteilles et au verre cassé qui hérissent le chevron, et vole un fruit, un pain. Si le propriétaire de ce fruit ou de ce pain l'aperçoit et prend son fusil et le tue, eh bien, tout est dit ; ce chien est tué, voilà tout. Si la loi saisit ce voleur, elle l'envoie aux galères pour dix ans. Autrefois, elle le pendait. Plus tard, elle le marquait au fer rouge. Maintenant les mœurs sont douces ; les lois sont bonnes personnes. La casaque, le bonnet vert et la chaîne aux pieds suffisent. Dix ans de bagne, donc, à ce voleur. Cet autre est riche et vole les pauvres. C'est un gros marchand. Il a maison en ville et maison de campagne. Il va le dimanche en cabriolet ou en tapissière, avec force amis roses, gras et joyeux, s'ébattre dans son jardin de Belleville ou des Batignolles. Il fait apprendre le latin à son fils. Lui-même est juré, électeur dans l'occasion prud'homme, et si le vent de la prospérité souffle obstinément de son côté, juge au tribunal de commerce. Sa boutique est vaste, ouverte sur un carrefour, garnie de grilles de fer sculptées aux pointes splendides, avec de grandes balances dorées au milieu. Un pauvre homme entre timidement chez le riche, un de ces pauvres diables qui ne mangent pas tous les jours. Aujourd'hui, le pauvre espère un dîner. Il a deux sous. Il demande pour deux sous d'une nourriture quelconque. Le marchand le considère avec quelque dédain, se tourne vers sa balance, jette dedans ou colle dessus on en sait quoi, donne au pauvre homme pour un sou de nourriture et empoche les deux sous. Qu'a fait ce riche ? Il a volé un sou à un pauvre. Il répète ce vol tant de fois, il affame tant de pauvres dans l'année, il filoute si souvent ce misérable sou que, de tant de sous filoutés, il bâtit sa maison, nourrit son cheval, arrondit son ventre, dote sa fille et dore sa balance. Il fait cela sans risques, sans remords, tranquillement, insolemment. Cela s'appelle vendre à faux poids. Et on ne le punit pas ? Si ! Il y a une justice dans le monde ! La loi prend parfois cet homme sur le fait. Alors elle frappe. Elle le condamne à dix jours de prison et à cent francs d'amende. Victor HUGO, Choses vues Victor Hugo Détruire la misère » 9 juillet 1849Le discours de Victor Hugo appuie la proposition d'Armand de Melun visant à constituer un comité destiné à préparer les lois relatives à la prévoyance et à l'assistance publique ». Je ne suis pas, messieurs, de ceux qui croient qu'on peut supprimer la souffrance en ce monde ; la souffrance est une loi divine ; mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu'on peut détruire la misère. Remarquez-le bien, messieurs, je ne dis pas diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire, je dis détruire. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en pareille matière, tant que le possible n'est pas fait, le devoir n'est pas rempli. La misère, messieurs, j'aborde ici le vif de la question, voulez-vous savoir jusqu'où elle est, la misère ? Voulez-vous savoir jusqu'où elle peut aller, jusqu'où elle va, je ne dis pas en Irlande, je ne dis pas au Moyen Âge, je dis en France, je dis à Paris, et au temps où nous vivons ? Voulez-vous des faits ? Il y a dans Paris, dans ces faubourgs de Paris que le vent de l'émeute soulevait naguère si aisément, il y a des rues, des maisons, des cloaques, où des familles, des familles entières, vivent pêle-mêle, hommes, femmes, jeunes filles, enfants, n'ayant pour lits, n'ayant pour couvertures, j'ai presque dit pour vêtement, que des monceaux infects de chiffons en fermentation, ramassés dans la fange du coin des bornes, espèce de fumier des villes, où des créatures s'enfouissent toutes vivantes pour échapper au froid de l'hiver. Voilà un fait. En voulez-vous d'autres ? Ces jours-ci, un homme, mon Dieu, un malheureux homme de lettres, car la misère n'épargne pas plus les professions libérales que les professions manuelles, un malheureux homme est mort de faim, mort de faim à la lettre, et l'on a constaté, après sa mort, qu'il n'avait pas mangé depuis six jours. Voulez-vous quelque chose de plus douloureux encore ? Le mois passé, pendant la recrudescence du choléra, on a trouvé une mère et ses quatre enfants qui cherchaient leur nourriture dans les débris immondes et pestilentiels des charniers de Montfaucon ! Eh bien, messieurs, je dis que ce sont là des choses qui ne doivent pas être ; je dis que la société doit dépenser toute sa force, toute sa sollicitude, toute son intelligence, toute sa volonté, pour que de telles choses ne soient pas ! Je dis que de tels faits, dans un pays civilisé, engagent la conscience de la société tout entière ; que je m'en sens, moi qui parle, complice et solidaire, et que de tels faits ne sont pas seulement des torts envers l'homme, que ce sont des crimes envers Dieu ! Vous n'avez rien fait, j'insiste sur ce point, tant que l'ordre matériel raffermi n'a point pour base l'ordre moral consolidé ! Laphoto ayant été prise au mois de mars, Palmyre y connaît son bref printemps, la terre a été retournée et/ou labourée en prévision des cultures d’été. Traversant les tracés des labours et les planches d’irrigation2, on voit clairement la double forme elliptique-circulaire d’un amphithéâtre.I C'est lui. — Ce n'est pas lui. — Je te dis que c'est lui ! — Je te dis que non… » Le concierge faisait une voix plus grosse que la concierge. Mais cette belle fille de Bourgogne vineuse avait son cri, qui valait l'autre, pour pénétrer portes, cloisons, murailles, d'un suraigu ce n'est pas lui ». Toutes les loges des rues de Poitiers, de Verneuil, de Lille, de l'Université avaient fini par déléguer quelque représentant dans le joli petit entresol où gisait le mince cadavre contesté. Près de la main raidie, sur les draps rosés de sang pâle, un revolver de nacre paraissait dire, un peu confus Voici que j'ai tué. » Mais la concierge s'expliquait. Elle articulait Ce n'est pas notre locataire. Ce n'est pas le monsieur du 20 de la rue de Poitiers. Je le connaissais bien ! Je faisais son ménage, je le raccommodais, je cirais ses petites bottines. — Eh ! non, qu'est-ce que tu veux ! Nous n'y pouvons rien ? C'est lui, répliquait l'obstiné. — Mais tu l'as bien vu comme moi, hier, quand il nous a payés. Il avait les yeux clairs, les paupières propres, les cheveux bien peignés, son air qui faisait jeune. Trente ans ? Trente-cinq ? Pas beaucoup plus. Ça, c'est un vieux, chauve, avec des yeux bordés de rouge. On l'aura déposé, ici, à la place de mon Monsieur… — Qui, on ? Personne n'est entré ni monté… Pour le déposer, qui ça ? — La cambriole… — Pas de porte forcée, dit-il. La serrure intacte… — C'est malin, quand on a la clef ! — Et Azor, tu l'oublies ? il ne peut sentir un étranger. — Les chiens dorment comme les gens. — Pas lui ! Il aurait jappé. — Il est comme les autres. Et puis, vois cette barbe… Il la portait en petite pointe très bien la barbichette de tout le monde, il y a quinze ans. Vois sa photo de cet hiver. Ça n'a pas de rapport avec les longs poils qui coulent sur la chemise, et ces frisons, comme aux bohémiens à la foire. En voilà une qui n'est pas poussée d'hier soir ! » Et les mains dans les poches de son tablier, elle n'arrêtait pas Sa barbe à lui n'avait pas deux travers de doigt… Et celle-ci… — Elle est peut-être fausse, dit l'homme. — Va donc la tirer, tu verras. » Il se met en marche. Un grand diable de sergent de ville se lève pour crier les paroles sacramentelles Ne touchez rien. On est allé chercher Monsieur Wladimir. » II Ce grand nom fit une espèce de paix du silence. Bien qu'il en fût aux modestes fonctions de chien de commissaire ou secrétaire du commissaire de police, Monsieur Wladimir n'était pas le premier venu au quartier Saint-Thomas d'Aquin. Son prestige s'étendait aux Invalides et au Gros-Caillou. Actif, allant, serviable, toujours prêt aux explications claires, aux renseignements précis, il ne se faisait pas prier pour donner un conseil. Les ménagères lui savaient gré de sa complaisance autoritaire, certains bourgeois huppés s'en étaient bien trouvés, et de belles dames aussi. Il soufflait dans sa voilure une popularité de bon goût, comme il convient dans ces quartiers. On avait perdu son nom de famille. Le prénom distingué faisait flotter sur son berceau d'agréables pans de mystère honnêtes bâtardises de grand-duc, d'archiduc, ou d'ambassadeur. De vieux Parisiens renseignés en souriaient avec réserve ; parler n'eût fait ni bien ni plaisir à personne. Mais enfin, il n'était pas tout à fait ignoré que le futur chien du commissaire avait été vu, faubourg Saint-Honoré, dans la maison d'une haute princesse de France, en la simple qualité de valet de pied. Autant que bonne et généreuse, Madame d'X… était un esprit de vaste culture et de très haut bon sens. Le hasard avait fait qu'elle employât particulièrement Wladimir à retenir et à garder ses places aux grandes conférences dont elle ne manquait pas une Sorbonne, Notre-Dame, Académies, Collège de France, institut d'Action Française, elle y trouvait satisfaction pour son goût des idées, de leurs rapports, de leurs conflits. Elle avait remarqué, à plusieurs reprises, que cette perle des valets s'arrangeait pour ne jamais quitter une salle, fût-elle comble ; le bras chargé de l'imperméable ou de la pelisse, il se tenait debout au fond sans perdre un mot du professeur ou du conférencier. Un jour, s'étant retournée par miracle, que vit-elle ? Son Wladimir ouvrant une bouche de four, l'œil plus grand que nature, et béant tout entier, avec une expression de félicité qui n'était point du tout d'un bêta. Quand on fut de retour, elle voulut en avoir le cœur net et se mit à le questionner. Wladimir récita de bout en bout le cours auquel il venait d'assister, sans faire grâce d'une acrobatie du maître. Avait-il aussi bien compris que retenu ? Ses réponses le classèrent à l'égal de ce qu'auraient donné les philosophes mondains et les agrégés de passage dans les dîners de la princesse. Elle sauta sur son stylo Mon cher Préfet, écrivit-elle à Jean Chiappe 1, savez-vous qui nous a ramenés, hier, vous et moi, de Bergson ? Un phénomène ? Non ! Un prodige ? Non ! Un phénix ! Me voyez-vous faire ouvrir mes portières par un phénix ? Je n'aime pas qu'on laboure avec un diamant. Donc, acceptez-en le cadeau. Tirez-le d'ici, vite ! Empêchons ce coulage ! Il faut que ce garçon fasse son chemin. Prenez-le donc dans vos bureaux ! Un tour de faveur au besoin, pour qu'il y ait un peu de justice en ce triste monde ! Wladimir dut porter le poulet à Jean Chiappe, qui aimait aussi le talent et la justice. Il avait la princesse en vénération. Un interrogatoire délicat et bienveillant fit apparaître que Wladimir, ayant amorcé de bonnes études, les avait interrompues trop tôt par un gros revers de fortune. De place en place, il avait dû accepter celle qui l'obligeait à mettre ses mollets à l'air. Après un stage favorable au cabinet personnel du préfet, les chances et les risques de la vie parisienne surent organiser pour Monsieur Wladimir de petites missions suburbaines ; ses enquêtes fort bien menées firent valoir ce qu'il avait dans l'esprit de rigoureusement déductif et logique. La veine ! » disaient les uns. Et les autres le flair ! » Que ce fût par logique, sens critique ou bonne fortune, il réussissait à passer des concours et à décrocher des grades qui permirent de le nommer dans le centre de Paris, où l'attendaient d'autres succès. Le mérite de l'homme releva des fonctions restées secondaires. Entre temps, par la protection de son officier de paix, le poète Ernest Reynaud 2, de l'École romane, Monsieur Wladimir publia deux plaquettes de vers. D'un sentiment un peu froid, elles valaient par l'élégance et trahissaient l'amour des disciplines philosophiques. La bonne princesse exultait. Elle était ravie de le rencontrer quelquefois au pied de chaires fameuses, de lui sourire et de l'accueillir. Lui n'avait garde de chercher à reparaître dans la maison où il avait servi ; cette discrétion ajoutait à sa gloire en fleur. Signe de tact, disait la princesse. — De tact et d'amour-propre bien compris, disait aussi Jean Chiappe, qui tenait Monsieur Wladimir pour l'une des espérances de son personnel. » Il ajoutait Je lui vois un point faible. Homme d'une seule idée. Il n'en a qu'une à la fois. Alors, c'est la cloche pneumatique. Par le vide, l'idée solitaire gonfle, et gonfle à crever. Faute de trouver des complémentaires qui l'équilibrent, cette idée fixe peut conduire à des formes de fanatisme… — Oh ! fanatisme ! De la politique, alors ? demandait la princesse. — Heureusement pour Wladimir, il ne fait pas de politique. Je vois un fanatisme de sentiment, d'école, de chapelle… » Et la princesse faisait taire M. Chiappe, et M. Chiappe ne demandait pas mieux, car il aimait Wladimir pour ses talents et pour ce que son ascension sociale avait d'ancien et de nouveau, encore que de plus en plus rare dans la vie moderne. Il se félicitait de la part qu'il y avait prise, et Monsieur Wladimir n'en faisait que mieux son chemin. Ivre de belle confiance, il ne laissait rien démêler de sot. III Dès que le chien du commissaire eut pénétré dans l'appartement, le bataillon des concierges lui rendit les honneurs ; hommes de ci, femmes de là, il fut conduit processionnellement, entre deux haies, jusqu'au pied du gisant. Ni grand, ni petit, jambé, râblé, musclé, sachant jouer de l'œil, du coude, du genou, c'était un assez beau garçon que Monsieur Wladimir, avec ce soupçon d'importance qui ne prélude pas mal à l'autorité. Les deux chansons recommencèrent C'est lui ! — Ce n'est pas lui ! » Mais le concierge mâle fit son rapport en règle. Un écrivain connu, Denys Talon, locataire de l'entresol, s'était donné la mort, cette nuit, ou ce matin. S'il n'est pas mort tout de suite, l'agonie, le mal, la souffrance avaient pu altérer quelque peu ses traits. Mais, foi de gérant de l'immeuble, dont il avait la garde depuis dix ans, il ne pouvait y avoir de doute sur l'identité… Ce n'est pas mon avis, monsieur Wladimir, dit la femme. Eh ! regardez-moi cette barbe ! » L'homme répondit posément J'ai déjà dit que la barbe pouvait être fausse. — Voyons », dit M. Wladimir, qui approcha, tira. La barbe tint. Madame triompha Tu vois bien que ce n'est pas lui ! » L'homme allait répliquer on ne sait quoi. Mais voici du nouveau monsieur Wladimir ayant légèrement soulevé le haut du corps mort, l'on entendit un bruit clair, comme des billes roulant sur le parquet. Il se baissa et put ramasser, une à une, dix-neuf dents, à la vérité vieilles, jaunâtres, presque noires !… Nouveau, triomphe de Madame Les dents de M. Talon, ça, ces chicots de vieux ? Il riait comme un petit loup. Je le sais bien ! Je le lavais, le brossais, le voyais tous les jours… » M. Wladimir demanda s'il n'y avait pas d'autres témoins. Personne ne répondit. La dispute aurait repris quand l'attention du magistrat fut détournée des contestations subalternes. Sur la table de nuit, contre l'étui de l'arme et la grande montre-réveil, se découvrait un assez fort manuscrit dont la chemise brune portait ces mots Récit, confession, testament écrits à main courante. Par-dessous, au milieu du premier feuillet, on lisait en grosse ronde calligraphique le titre suivant LE MONT DE SATURNE suivi de trois sous-titres Le rêve, la vie, la mort et d'épigraphes variées. M. Wladimir se dit que la clé de l'affaire était là, le moyen de la trouver, ou celui de la fabriquer. Il congédia l'assistance en ajoutant qu'il allait voir cela tout seul, mais non sans prescrire au planton d'aviser le commissariat que l'enquête le retiendrait tout le jour, on n'avait pas à compter sur lui jusqu'au soir. M. Wladimir s'assit. Il lut. IV M. Wladimir, secrétaire du commissaire de Saint-Thomas d'Aquin achevait la lecture qui allait faire éclater son génie. Aux derniers mots, il avait cru entendre la détonation et voir l'écrivain Denys Talon tomber à la renverse sur l'oreiller. Mais, dit-il à mi-voix, s'est-il tué raide ? C'est ce que le concierge semblait penser… » On frappa Au diable l'intempestif ! » C'était le médecin des morts. Heureusement, il était fort pressé. Ses premiers mots prirent la suite du soliloque de M. Wladimir Le concierge semble estimer que M. Talon ne serait pas mort tout de suite… Alors, il se serait un peu manqué ? » L'homme de l'art, ayant tâté sommairement, reprit Un peu. » Il repalpa. De peu. Le sang perdu. Le cœur… — Mais, demanda le policier, à quelle heure peut bien remonter le décès ? » Nouveaux tâtons rapides Les dernières heures de la matinée, peut-être. Midi au plus tard. Pour l'identité, savez-vous ? La femme criait, contestait… » M. Wladimir donna au manuscrit une petite tape du dos de la main et dit, d'un ton capable La question ne se pose plus. » Monsieur Wladimir avait tout vu la promptitude de son intuition, la rigueur de sa déduction l'avaient fixé. Il murmura La mort n'a pas été instantanée ? Il a agonisé dix heures ? Donc tout s'explique. » Le médecin partit au trot. Il avait apporté les lumières de la science. M. Wladimir en recueillait pieusement le dernier rayon, mais il l'ordonnait et l'organisait Un peu manqué, longue agonie. Oui, se disait-il à voix haute, tout colle, tout s'enchaîne, tout s'articule et se lie. » … Où d'autres, à sa place, n'auraient vu que trente-six mille chandelles, il regarde s'étendre devant lui une nappe de clartés qui montent, en s'égalisant vers les paradis de la certitude. Il boit et reboit ces flots purs, il s'en pénètre à fond. Sa conviction qui s'est formée a ce caractère particulier qu'elle est corroborée par ce qui pourrait l'ébranler désaccord des concierges, silence d'Azor, serrures intactes, les dix-neuf dents jaunâtres détachées d'elles-mêmes, le poil allongé et vieilli. Ce qui ferait difficulté facilite l'explication ou la vérifie. Que la barbe de Denys Talon se soit permis de croître d'une façon démesurée par rapport aux quelques dix pas de l'aiguille sur le cadran, ou bien que les dents aient jailli de l'alvéole au premier mouvement du corps mort, attestant une singulière vitesse de la carie, cela n'importe plus que pour s'interpréter en bonne méthode les faits sont patents, et leur ombre de résistance s'évanouit au clair d'une saine philosophie. V Car M. Wladimir sait une bonne chose qu'il a apprise à bonne école, que le Temps vulgaire n'existe pas ou que ce Temps n'est pas le vrai ! Un grand écrivain du XVIIe siècle a donc été bien fat quand il a prétendu pouvoir fournir aux hommes la bonne heure en disant Je tire ma montre ». Ô illusion du vain prestige pascalien ! Le temps des montres » est un faux temps, tel que l'esprit le projette sur leur cadran Un temps tout mécanique, donc ir-ré-el ! » se répétait, en épelant, M. Wladimir, selon le b-a ba d'un grand maître ; il lui revenait d'en faire aujourd'hui la toute première application administrative et légale. Ir-ré-el. » Quand l'écrivain Denys Talon a mis le point final à sa phrase suprême Ça va y être, ça y sera », deux heures venaient de sonner. Il a tiré. Il était certainement mort à midi. Entre ces deux termes, l'heure de l'horloge » avait pu marquer ou sonner leur chiffre artificiel ; mais combien plus de coups, combien plus de pas, lui aurait chantés l'Heure vraie ?… L'heure du temps réel, ré-el, épela M. Wladimir. Pour ce temps, combien d'heures ont pu tenir dans la vie du cadran ? Cinquante ? cent heures vraies ? Mille ? Dix mille ? La marge est élastique, extensible à l'infini, on l'agrandira autant qu'il en sera besoin… » La parole qu'extériorisait le jeune policier s'arrêtait là, pour le moment. Il s'ouvrit une longue méditation silencieuse. Voyons ! voyons ! se disait-il, avec une espèce de chant qui retentissait dans les catacombes de son esprit. Ce Denys Talon était doué d'une vitalité exceptionnelle. Presque toute-puissante. Insatiable. Sans parler du nombre, de la diversité et de la violence de ses peines d'amour, l'énergie de sa conduite une fois résolue, le tableau sans bavure de sa journée d'hier portent le même caractère ; courses, commandes, legs, hammam, assaut d'armes, ronde de nuit, et le soin donné aux dernières pages, à cet exposé final, dramatique et lucide, où les abstractions sont produites en symboles clairs, en voilà un que ses déboires sentimentaux n'avaient pas épuisé ! Les pessimistes allemands interdisaient le suicide comme le coup d'éclat d'une vitalité qui ne s'est pas renoncée, ils y voyaient comme le triomphe du Vouloir-vivre. Ils avaient raison pour le cas que voilà ; notre homme était en pleine forme, ivre de ses chaleurs vitales et des clairvoyances de sa raison. Une seule faille apparaît dans cette personne si forte ! Sa pitoyable philosophie. La philosophie classique française des idées claires. Cartésienne ou thomiste, cette idolâtrie de ce qui se fabrique et se définit au grand jour. Ah ! le pauvre garçon ! Et il a cru pouvoir se battre, lui, tout seul, contre ce vrai Moi subliminal que remonte et recouvre, sans le dominer, notre menu Moi conscient ! Il ignorait que ce qui surgit, comme un seuil, de la masse des choses vers leur obscur sommet, ne peut qu'émerger un instant des gouffres de l'Inscruté et de l'Ignoré ! Le pauvre Denys a cru vaincre son grand Moi latent, secret, insondable, avec les débiles élans et la chétive industrie de l'intelligence explicite. De quel triomphe inane s'est-il abusé ? L'insensé a cuydé avoir également raison de la nature universelle ainsi que de son propre naturel souterrain. La nature invaincue, la nature invincible ! Elle l'a brisé en un temps et deux mouvements, lui et les armes dangereuses qui devaient éclater dans sa main. Abréger sa Durée ! Il prétendait donc à cela ! Raccourcir, mutiler sa réalité essentielle ! Le plus inégal des duels ! Le résultat s'en voit, se touche. Non seulement la mère-nature, autrement forte que lui, a été plus maligne. Elle ne s'est pas laissé battre. Pour parler comme lui, c'est elle qui l'a fait quinaud. Ce qui s'est passé est ce qui devait se passer, selon toutes les normes. Denys Talon a commencé par se manquer un, peu. Bien fait ! lui aura sifflé la mère-nature. Je t'avais solidement charpenté. Tu étais, comme on dit, bâti à chaux et à sable. Même ton insensée main droite ne pouvait pas t'obéir, l'index droit devait te trahir, cette volonté d'épiderme et d'écorce devait jouer contre ton futile dessein temporel pour te plier et te ployer à la loi de l'éternité… Monsieur Wladimir, après avoir fait parler la Nature, reprenait pour son compte Denys Talon devant mourir octogénaire, le programme normal de son agonie à quarante ans devait faire tenir dans l'arc d'un demi-tour de soleil ou de lune cette vie forcenée qui lui bourrait la moelle, et les nerfs, les muscles et les os. En ce tout petit espace du temps sidéral et, comme l'a bien dit Monsieur Bergson, du temps mécanique, devait se condenser, se concentrer, se contracter la quintessence des quarante ans qui restaient à brûler de l'élixir vital, des fluides qui l'animaient. Traduisons ce que cela veut dire. Un monde intérieur aux vibrantes images lui a fait sentir et souffrir ce que lui avaient préparé son âme et sa chair. Pour une certaine mesure, et dans cette mesure, il lui a fallu savourer toute la dose de désirs et de déceptions que lui avaient valu ses anciennes amours, ce que devaient lui revaloir d'autres amours futures aux nouvelles saisons d'autres Marie-Thérèse, d'autres Ismène, d'autres Hydres blondes et d'autres Gaëtane, avec ce mandat exprès de courir aux suivantes sans en être jamais content, selon la haute chanson de Menoune, mais en outre, en application de toutes les légalités de sa longue ligne de vie, symbole efflorescent de l'infra-physique fatal. Son corps en a reçu les secousses, et donc enregistré les marques. Comment en eût-il été autrement ? Idées, émotions, rêves, actions, déchirures subites ou érosions lentes, ce qui lui ébranlait l'âme dut aussi retentir ailleurs, tout le temps réel qu'il a souffert sur ce petit lit. Et je ne parle pas d'un seul genre de fatigues. Dans son agonie, sans bouger de place, Denys Talon aura voyagé, il aura éprouvé les trépidations des rapides du monde, il a monté et descendu, et aussi redescendu les houles des navires de tous les océans. Partout les peines et les plaisirs inéprouvés le fouettèrent à l'épuiser. Des femmes de toutes couleurs, des drogues de toutes saveurs ! Il a bien fallu que sa fibre vieillisse à proportion de sa prodigieuse capacité de durée, ce pur synonyme de l'âme, Monsieur Bergson nous l'a bien dit. La peau de chagrin était large, Denys Talon l'a ratatinée en vitesse, mais vitesse apparente qui n'était pas le train réel de l'écoulement de sa vie. Dans le même demi-tour du cadran, ne l'oublions pas, il a dû faire aussi son métier d'écrivain, sécréter, suer et saigner des livres inédits que nous ne lirons pas ; il les a rédigés en rêve et, comme tout le monde, il enfantait dans la douleur ce qu'il avait conçu dans la joie. Toute cette œuvre prolongée a dû être reprise, corrigée, remaniée, puis défendue devant la critique. Que n'a-t-il pas écrit, et fait ? Sans crever la souple membrane physique, élargie ou rétrécie suivant les besoins, et dont il faisait tous les frais, il exploitait son temps réel, tout en vidant son élastique fourre-tout du Grand Tout… Le sourire des derniers mots montre que M. Wladimir, comme tout sacristain, savait un peu jouer des vases de l'autel. Mais il se remit à prier Ô temps réel, que n'aura dû et pu instiller et loger dans tes alvéoles mobiles un homme du ressort de Denys Talon ! Outre ses travaux, n'y eut-il pas ses maladies ? Dans ces dix heures qui auront valu quarante ans, les fièvres l'auront agité qui l'aidèrent à se dégrader corporellement, et voilà les faits rejoints, nous pouvons les affirmer ; comment ces maladies ne lui auraient-elles pas séché, blanchi, allongé le poil, creusé, ébranlé et jauni la mâchoire avec cette apparence de rapidité illusoire qui peut paraître insensée, alors que, très précisément, le contraire l'aurait été ! Souvenons-nous de ce que peut le rêve sur nos sommeils. Le poète y fait des vers, le savant résout des problèmes, le négociant achète, vend, emprunte, paie, encaisse et ristourne. Si, pour eux, l'usure nerveuse est insignifiante, elle existe, elle ne peut ne pas retentir sur leur organisation. Même à l'état de veille, les bouleversements moraux ont des effets matériels tenant de la magie, la mauvaise aventure blanchit en une nuit une jeune tête de femme, une brusque douleur laboure de rides profondes la lisse paroi d'un beau front. Assurément, par rapport à ces cas extrêmes, celui de Denys Talon peut paraître encore effarant. Soit. Et nouveau ! Soit ! Et, jusqu'à présent, inconnu. Soit encore ! Le vaste sein de la Nature naturante… Car M. Wladimir se mettait au beau style. … le vaste sein de la Nature naturante réserve à nos explorations bien d'autres surprises que l'allongement instantané d'une petite barbe ou la prompte carie de dix-neuf dents. Rien ne peut limiter ce champ mystérieux. À quoi bon déflorer ce qu'lsis voile encore ? Tenons-nous fermement à l'aveu tangible d'un étrange potentiel de cet élan vital, le Nisus, l'Impetus 3, tout ce qui peut souffler sur le bûcher humain. Étant ce qu'il était, soumis aux courants qui le régissaient, le système pileux de Denys Talon devait subir l'implacable impératif interne de gagner un certain nombre de centimètres en dix heures ; son système dentaire ne pouvait se dispenser de se gâter et de se décoller aux deux tiers, non dans un vain espace de temps mathématique fixe, mais conformément à la mesure de sa vie et de ses esprits. Ainsi des rides, ainsi du teint ! L'invisible chef d'orchestre accélérait la mesure de son bâton ; les esprits animaux centuplaient la rapidité de leur bal, et le quadragénaire cédait ainsi la place au vieillard, comme la concierge l'a fort bien vu quand elle a refusé de le reconnaître. Mais ça a été sans nulle intervention de cambriole, tout simplement parce qu'une certaine lampe qui avait de quoi brûler et flamber quarante ans devait se consumer en une demi-nuit. Cela peut changer les idées reçues, non les idées de M. Bergson, mon maître, que voilà ainsi remarquablement fortifiées et corroborées. » VI Telle fut, dans ses grandes lignes, la méditation de M. Wladimir. Il ne s'en tint point là. Esprit consciencieux, il tira de son imperméable un petit livre 4 paru la veille et dont il avait dévoré déjà plus des trois quarts. Un signet, page 219, marquait ces lignes concluantes, qui cochaient en rouge et de bleu une précieuse interviouve de M. Bergson 5 La considération de la durée pure me fut inspirée par mes études mathématiques, alors que je ne songeais nullement à me poser en métaphysicien. Elle se borna d'abord à une sorte d'étonnement devant la valeur assignée à la lettre t dans les équations de mécanique. Mais le temps mécanique, c'est celui de l'horloge. C'est celui de tous les jours… Donc, pas le temps d'un type aussi particulier que Denys Talon, remarqua M. Wladimir. » Il revint à son maître … Et si je réussis à démontrer qu'il n'est ce temps d'horloge qu'une dimension de l'espace, il nous faudra bien conclure que nous étalons sur un espace imaginaire notre temps intérieur, ou durée réelle, qui, lui, est indivisible et se situe absolument hors de l'espace… C'est bien cela. Hors de l'espace, répéta M. Wladimir. Hors du tour ou du demi-tour d'un cadran. Hors d'aucun espace visible. Ab-so-lu-ment intérieur. Le seul qui soit vrai ! L'espace bassement approximatif des horloges peut, cahin-caha, mesurer la lente mue habituelle de notre pauvre corps, son changement insensible “de tous les jours” d'après le cours observé des corps spatiaux qu'il est juste d'appeler irréels comme le soleil ou imaginaires comme la lune, mais cet espace-là ne mesure en rien les mues de l'humain, à plus forte raison d'un humain privilégié comme le client d'aujourd'hui. Pour dévorer cette jeune vie et la conduire à son degré de consomption ascétique et squelettique, le feu intérieur ne s'est pas contenté de prendre un bon galop, il a couvert avec des bottes de sept lieues ce que la vie coutumière aurait mis d'infinies années spatiales à parcourir. Tous les organismes ne sont pas aussi magnifiquement doués pour participer à l'incendie universel. Quelques-uns peuvent approcher celui-ci. Mais d'autres peuvent le passer. Après tout, pourquoi une simple demi-heure du même impetus du nisus bien accéléré ne ferait-il tomber en une pincée de cendres un Denys Talon mieux flambé. » Ainsi allait, allait le monologue du jeune policier, philosophe antimathématicien. Tout à l'enthousiasme de la contribution sans pareille qu'un fait-divers de son ressort et de son quartier apportait à la doctrine des doctrines, au maître des maîtres, il se reprochait encore la modestie et la prudence de son langage. Simple contribution, cela ? Non, une preuve par neuf ! Quelle douche pour les impertinents qu'il avait entendus, à la table de la Princesse, se permettre, jadis, objection ou contradiction ! Ce que le Maître avait pensé et démontré, l'humble disciple en apportait la confirmation par l'expérience, événement non négligeable en matière scientifique, ce bon et brave corps mort qui, par son poil et sa denture, est devenu tel que l'a dû méconnaître l'œil de sa propre femme de ménage et concierge très dévouée. Le regard de M, Wladimir flottant sur la couche funèbre, baignait aussi dans une douce mer de lait, comme il s'en manifeste dans les aurores de l'Esprit. VII Il n'y tint plus. Il expédia les menues formalités de son rite et, d'un pied léger, le manuscrit au bras, petit traité bergsonien en poche, il courut à perdre haleine jusqu'à la haute maison dont il s'était interdit l'accès, par un honorable mélange de tact et de respect humain. La Princesse était chez elle, et seule, de loisir, elle le reçut sur-le-champ. Il put tout raconter et recueillir les signes d'un sensible intérêt. Elle voulut connaître le texte de Denys Talon. Wladimir en fit l'entière lecture. La sage et spirituelle Française écoutait avec ce sourire des yeux qui n'eut pas son pareil. Quand il eut achevé par le cantique enthousiaste de sa bergsonite indurée, elle dit de sa voix jeune, où tintait un rire léger Vous êtes sûr de tout cela, mon bon ami ? » Il répondit, un peu gourmé C'est, Madame, que je ne vois pas où mettre la place d'un doute. — Moi, dit-elle, je douterais de Monsieur le concierge. Ces fonctionnaires sont un peu formalistes. Et quelle sainte frousse des responsabilités ! Dans l'immeuble, où tout doit être bien, alors tout l'est tout va bien ! Azor doit aboyer, il aboie, aboiera toujours… Ah ! je connais mon vieux Paname, ses concierges mâles compris ! J'aime mieux leurs femmes. Des reines ! Eux, de simples princes consorts. Le vôtre a eu le tort de ne pas écouter la sienne. Pour le chien, elle avait raison depuis quand ne sait-on plus faire taire le chien dans une mystification bien montée ? — Une mystification ! Madame ! — Disons supercherie… ou encore, comment dit-on ? une fumisterie. Un peu macabre, oui. Pendant que vous disiez de si belles choses, je pensais, comme la concierge, à une part possible des moyens de la cambriole !… — Quelle cambriole ? Où ? De qui ? Pour qui ? » Les beaux yeux semblaient répondre comme dans Gyp 6 Ben ! Bédame ! C'est votre affaire, à vous, messieurs de la Tour-Pointue ! » Lui, sans rien voir, poussait l'argument Et puis, le manuscrit ! Il est bien clair ! » Mais elle Il est trop clair, je m'en méfie aussi. Et puis, votre monsieur Talon, je l'ai un peu connu, je l'ai même reçu. Il était fort gentil. Nous nous entendions. Peut-être m'aura-t-il comprise, en tout bien tout honneur, dans la distribution de ses souvenirs. Mais personne n'aura aimé comme lui à jeter de la poudre aux yeux. Il se fût fait hacher pour un paradoxe de quatre sous. Ah ! le beau mythomane ! On ne lui ferait pas une grande injustice en supposant qu'il disparait pour reparaître. À moins qu'on ne le retrouve comme le pauvre Jean Orth 7, l'archiduc, dans quelque Patagonie, sur l'Orénoque ou l'Amazone ou bien chez des Papous, qui auront oublié de le manger, comme son pistolet de le tuer… Je suis tranquille. Il reviendra, ne sera-ce que pour respirer le succès du livre posthume. Car ce livre peut en avoir. Vous allez le porter tout de suite chez l'éditeur, n'est-ce pas, mon bon Wladimir ! — Mais, madame… — Ah ! à moins que Talon lui-même n'en ait chargé le concierge qui, sûrement, en a copie. Car il en sait long ! — Le concierge ? — Bien sûr, mon ami. C'est quelque nouveau truc de lancement en librairie. Nos gens de lettres sont capables de tout. » Wladimir, montrant ses connaissances, évoqua du Laurent Tailhade 8 Venez ici, Gens de lettre et de corde ! — Je retrouve mon Wladimir, s'écria la Princesse, heureuse. — Cependant, madame, vous avez bien ouï ce que Talon a écrit en toutes lettres, ses je me tue, ses ça y est. — Ce qui s'écrit ne peut pas toujours arriver. — Mais alors ! ce cadavre de remplacement ! Talon l'aurait introduit dans son appartement, mis dans son lit ? Où l'aurait-il trouvé ? — Mon bon Wladimir, un écrivain fréquente les amphithéâtres, les hôpitaux, la Morgue, les terrains vagues… Là ou ailleurs, si l'on y met le prix, croyez-vous difficile de trouver… comment dit mon neveu le carabin ?… de trouver un macchabée aussi frais que le vôtre ?… On aurait pu l'avoir plus frais ! Pesons les difficultés… avoir ce macchabée doit être plus facile que de faire dépenser dans une seule nuit, au même agonisant, quarante ans de combustible et des carburants vitaux. Quarante ans, Wladimir, combien cela fait-il de nuits ? — Près de quinze mille, madame la Princesse. — À dix heures de la nuit, cela fait cent cinquante mille heures ! C'est beaucoup, c'est un peu trop de les faire tenir en dix… — Je crois avoir dit à madame que l'écart m'avait paru eu effet un peu fort. — Gros, surtout. Si vous voulez mon sentiment, Wladimir, la Philosophie vous a fait perdre une occasion de conduire la fine enquête… Talon a de la chance ! Vous aurait-il flairé, pour aider sa combinaison ? Je crains que vos affaires n'en soient pas avancées à la préfecture. » La moitié de la fine enquête était déjà faite d'une très blanche main. La Princesse tenait et tendait le fil d'Ariane ; Wladimir ne le saisit point. VIII Piqué au vif, il reprit, non sans amertume Je regrette, madame, je regrette ! Il me semble que vous faites bien bon marché de ce que nous avons appris de M. Bergson. » Ce nous reconstruisait les bancs d'une École idéale et faisait asseoir la Princesse à côté de lui. Il insista Pouvons-nous oublier la magistrale distinction entre les deux Temps l'irréel, de l'horloge, le vrai, de notre corps et de notre cœur ? » Elle rit — Croyez-vous que je l'aie oublié ? Nulle femme n'eut à l'apprendre, depuis sa grand'mère Ève ! On me l'a fait chanter quand j'étais toute petite Que le temps me dure Passé loin de toi 9… » Et elle tapotait quelque clavecin idéal Dans les cinq petits mots du premier vers, la distinction est toute faite. » Mais Wladimir De qui est cela, madame ? De quel Bergson d'avant Bergson ? » Ses yeux s'ouvraient plus grands qu'à la leçon du Collège de France. Elle répondit Mais c'est tout bonnement l'air à trois notes de Jean-Jacques. Soyez tranquille. Ce n'est pas lui non plus qui découvrit la différence du tic-tac réglé d'une montre avec le galop varié du cœur qui attend… — Alors, monsieur Bergson n'a rien trouvé de plus, madame la Princesse ? — Là-dessus, pour moi, non. C'est d'ailleurs en son honneur, pour saProvidedto YouTube by Danmark Music GroupDans un amphithéâtre · Gérard Mainville · Daniel ColinLa super danse du tapis℗ Blue Cat / Rendez-Vous DigitalReleas Georges Brassens Jean Bertola TransposerGeorges Brassens Jean BertolaSong A A C7Calme, confortable, officiel, Fm CmEn un mot résidentiel, D A Tel était le cimetière où, B7 E7 Cet imbécile avait son trou. C E7 Comme il ne reconnaissait pas, Am EmLe bien-fondé de son trépas, F C L'a voulu faire, aberration ! Fm C G7 C E7Sa petite résurrection. A C7Les vieux morts, les vieux ici-gît », Fm CmLes braves sépulcres blanchis, D A Insistèrent pour qu'il revînt, B7 E7Sur sa décision mais en vain. C E7 L'ayant astiquée, il remit, Am EmSur pied sa vieille anatomie, F C Et tout pimpant, tout satisfait, Fm C G7 C E7Prit la clef du champ de navets. A C7Chez lui s'en étant revenu, Fm CmSon chien ne l'a pas reconnu D A Et lui croque en deux coups de dents, B7 E7Un des os les plus importants. C E7 En guise de consolation, Am EmPensa faire une libation, F C Boire un coup de vin généreux, Fm C G7 C E7Mais tous ses tonneaux sonnaient creux. A C7Quand dans l'alcôve il est entré, Fm CmEmbrasser sa veuve éplorée, D A Il jugea d'un simple coup d'œil, B7 E7Qu'elle ne portait plus son deuil. C E7 Il la trouve se réchauffant, Am EmAvec un salaud de vivant, F C Alors chancelant dans sa foi, Fm C G7 C E7Mourut une seconde fois. A C7La commère au potron-minet, Fm CmRamassa les os qui traînaient D A Et pour une bouchée de pain, B7 E7 Les vendit à des carabins. C E7 Et, depuis lors, ce macchabée, Am EmDans l'amphithéâtre tombé, F C Malheureux, poussiéreux, transi, Fm C G7 E7Chante Ah ! ce qu'on s'emmerde ici » ! F C Malheureux, poussiéreux, transi, Fm C G7 CChante Ah ! ce qu'on s'emmerde ici » ! Georges Brassens > Le Revenant > Yavait-il un amphithéâtre plus ancien avant les arènes de Nîmes Incroyable !
GenreComédie grinçantePublicAdultes et adolescentsTroupeAdultes et/ou adolescentsThèmesMédecineDurée7 minutesDistributions3H ExplicationsDistribution modulableNonVersifiéNonJouable par des enfantsNonJouable par des adosOuiJouable en plein airNonCostumeDeux tenues de chirurgiens médecins légistesUne tenue classique inspecteurDécorUn brancard, avec éclairage glauque en de langueC1 - AutonomeExplicationsLes textes du même genre Comédie grinçanteLes textes sur le même thème MédecineLes textes du même auteur Alain GIBAUD
I. — LES JUIFS. De toutes les entreprises dirigées contre Dieu, il n'en est pas de plus odieuse et de plus ridicule que la prétention des Juifs à le représenter sur terre. Un seul Dieu, le nôtre ; un seul temple, le nôtre ; un seul peuple, le nôtre, voilà toute la religion des Juifs. On s'explique qu'avec une telle foi, exclusive de tout le reste de l'humanité, les Juifs n'aient jamais pu trouver le chemin du cœur, et que, pour les admettre dans la grande famille sociale, on ait été si souvent obligé d'en appeler de l'instinct à la raison, et du préjugé à la justice. Dieu a fait la terre pour les hommes, et comme elle est toute petite en comparaison de lui, ils se sont rencontrés dès les premiers jours. Pour des sauvages, se rencontrer, c'est se battre. Pour les gens civilisés, se battre, c'est se fondre. Les nations se forment de peuplades fatiguées d'être tribus, de tribus lasses d*être familles. Emportées par un mouvement dont nous ne percevons que les effets, elles capitulent selon la loi du plus fort, les unes s'affaiblissant par la victoire, les autres se fortifiant par la défaite, car il n'est pas de règle en ces hautes matières. Entre tous les peuples anciens dont l'histoire nous intéresse ou nous éblouit, un seul nous inquiète et nous étonne c'est le juif. Le mystère de ses origines est pour peu dans le sentiment de curiosité qu'il nous cause. Il n'importe qu'il vienne de Crète, de l'Inde, de la feue Atlantide ou de plus loin encore. Ce qui nous frappe, absolument comme dans un animal, c'est la faculté qu'il a de se hérisser, de se mettre en boule, et de rouler toujours sans s'user jamais. Avec cela, un pouvoir inouï de résistance et d'envahissement ; c'est là dureté du kyste combinée avec l'avidité du cancer. Presque toujours vaincus sauf quand ils combattent contre eux-mêmes, esclaves ou maîtres, le plus souvent parasites, quelquefois exportés tout entiers comme une cargaison de chair et d'os, ruinés chez eux, ruinant les autres, en quelque état que la fortune les ait mis, les Juifs font carrière dans l'exil et fortune dans la misère. On les opprime, on ne les comprime pas. On les écrase, on ne les détruit pas ; on les humilie, on ne les abaisse pas ; même quand on les dépouille, on ne les appauvrit pas. Et ce serait un spectacle étrangement beau que l'histoire des Juifs, si l'on y pouvait découvrir une seule page je ne dirai pas d'amour, mais de considération pour les autres hommes. Ils ont répandu autour d'eux une telle semence de haine que cette semence germe encore après trente siècles écoulés. Les Grecs sont les premiers qui aient essayé de les réduire autrement que par les armes. Toutefois il leur fallut longtemps pour monter jusqu'à la Ville Sainte où était l'âme des Juifs, enfermée dans le Temple et dans la Loi. On les vit d'abord dans les colonies d'Alexandre comme Pella, Mygdonie, Piérie, Gérasa, Dium, mais la Galilée leur resta close. Lorsque la domination de Rome se fît sentir dans l'Orient, l'influence grecque diminua politiquement, mais elle avait déjà pénétré la langue, malgré la réaction des synagogues. Un peu delà pensée hellénique, plus claire, plus douce,, se glissait dans ces têtes aussi dures que la dure assiette du Temple. Il y eut d'heureux scandales un grand prêtre helléniste ; un autre encore ; une citadelle grecque en face de Sion, avec Jupiter Olympien dans le temple ; puis, malgré les Macchabées, des monnaies judéo-grecques, et, malgré le vieux parti pharisien, une certaine détente d'idées et de mœurs, la joie du boire, du manger et du reste montrant le nez dans des livres à demi sacrés comme l'Ecclésiaste. Lorsque la traduction en grec des livres dits saints fut décidée, il se trouva dans chaque tribu six hommes sachant assez la langue pour faire ce travail difficile. Le courant était devenu assez fort, un siècle avant Tibère, pour donner la couleur hellène à une société religieuse d'origine juive, celle des Esséniens. Il semble qu'on y ait enseigné le grec, puisque l'historien Josèphe fut leur disciple pendant trois ans et qu'il les quitta parlant cette langue et l'écrivant comme la maternelle. Semblables pour les mœurs aux caloyers des Iles ioniennes, les Esséniens avaient mis la mer Morte entre Jérusalem et eux, vivant du travail commun dans une commune discipline, pacifique confrérie d'environ quatre mille individus dont on ne soupçonnerait même pas l'existence si deux Juifs hellènes, Josèphe et Philon, et Pline, Romain trempé d'hellénisme, ne nous en avaient curieusement parlé Josèphe, avec une certaine reconnaissance[1]. Les Juifs d'Egypte, les Alexandrins surtout, sans cesser d'être Juifs étaient moins farouches que ceux de Jérusalem. Ceux-ci, par contre, s'étaient rejetés au fond du pharisaïsme, prétendant détenir le secret des textes hébreux, revendiquant le monopole des interprétations vraies, s'indignant au dedans d'eux-mêmes que ceux d'Alexandrie s'ingérassent d'en discuter, de les révéler dans une langue impie. Sans doute, lorsque les Juifs d'Alexandrie venaient au Temple adorer le vrai Dieu, les mains pleines de présents, ils étaient accueillis comme des frères, mais comme des cadets qui ne doivent parler qu,après les aînés, et plus bas, à la table de famille. II. — L'ESPÉRANCE D'ISRAËL. Je n'ai point à chercher si l'exécration encourue par les Juifs — c'est le mot d'Isaïe — a des causes ethniques[2]. Mais j'ai à chercher si elle en a de religieuses, et j'en trouve une qui rentre dans mon sujet, car elle appartient à l'histoire c'est l'idée de la prédestination des Juifs à gouverner le monde. Cette idée se traduit au dehors et au dedans par cette formule très simple Dieu nous a faits maîtres des hommes, et il le prouvera un jour par son Christ. L'idée christienne a varié avec les temps. Elle a été plus ou moins aiguë, plus ou moins lancinante pour quelques-uns, minorité infime, ère de réparation, mais tellement sûre que les païens eux-mêmes y sont tolérés après circoncision ; pour la plupart, ère vengeresse où le Juif tient tous les autres hommes sous le talon. La personne du Christ est souvent absente ; Dieu n'a pas besoin de Messie, il fait ses affaires lui-même. Seul son Jugement est certain, jugement fait d'avance, dicté par les prophètes et tout entier en faveur des Juifs, à part quelques apostats et quelques impies équitablement précipités dans l'enfer. Petit à petit, l'idée prend corps dans un envoyé de Dieu qui détient pour plus ou moins de temps, avec des attributions plus ou moins étendues, une parcelle du pouvoir divin, puis grandit dans les imaginations surchauffées, occupe toute la terre et tout le ciel, cachant un peu Iahvé par sa stature colossale. Tout Juif portait en lui l'idée christienne comme en vase clos. Au point où elle était sous Auguste, il ne restait plus qu'à régler protocolairement la réception du Messie in persona et specie. Il était d'autant plus -attendu qu'il était nécessaire. Qu'un Messie dût venir, pas un Juif n'en doutait. Mais sous quelle forme, avec quels pouvoirs, à quelle époque et pour combien de temps ? Autant de questions sur lesquelles on se divisait. Et comme toujours on revenait aux prophètes, divisés eux-mêmes sur son rôle et sur sa personne. Une fois venu, que fera-t-il ? Sera-t-il le Christ-Epée, le grand Messie régnant sur le monde enjuivé ? Sera-t-il un peu moins le Messie pratique qui commence par libérer le territoire, quitte à aviser ensuite ? Sera-t-il le Messie-Juge partial, bien entendu qu'a entrevu le Psalmiste ? Voilà sur quoi les Juifs pouvaient différer d'opinion selon leur tempérament ou leur éducation. Ce qu'il importe de savoir, c'est si, avant la confection du Jésus des Evangiles, ils avaient entrevu le Christ-Martyr, contraire à toutes leurs Ecritures, voire celles d'Isaïe, à toutes leurs espérances, à la définition même du Messie. Nulle part ce pis-aller n'eût été plus déplacé que parmi les Galiléens, chez qui s'incarnait l'idée d'intransigeance patriotique. Là il eût été non -seulement anormal, mais impie, injurieux. Un Messie-Martyr eût été un monstre, une Bête comme aucune Apocalypse n'en avait entrevu dans ses cauchemars les plus effroyables. Car, dans leur soif de puissance encore plus que de liberté, les Juifs étaient allés jusqu'à donner le nom de messie à un païen qui les avait servis. Dans Isaïe Iahvé appellera Cyrus son soldat et son christ, bien que Cyrus s'incline devant d'autres dieux ; mais il a obligé les fils d'Israël, il les a renvoyés dans leur maison, cela suffit Je te ceins, dit Iahvé, alors même que tu m'ignores ! Un Juif hardi pouvait donc réclamer pour lui, fils d'Israël ou de Juda, le nom que Iahvé avait donné à un païen par la bouche d'Isaïe, mais ce nom une fois pris, il fallait le mener à la victoire. C'est surtout pendant les occupations étrangères, les captivités, les servitudes que le christianisme s'exaspère. Lorsqu'avec Pompée, Rome s'établit sur la terre juive, la Louve fut une Bête nouvelle — la Bête de l'Apocalypse — dont les Juifs firent le tour avec une curiosité indignée. Les Écritures l'avaient prévue et annoncée, cette Bête vomie par l'Occident, mais il y a des choses qu'on ne croit qu'en les voyant. Toutes les autres Bêtes étaient venues d'Assyrie, de Macédoine ou d'Egypte on était habitué à leur poil et à leur cri, mais là vraiment, Bête nouvelle, Bête hérissée de crocs, de griffes, armée d'une gueule d'où sortait un bruit atroce, la langue des tribuns, des centurions et des aquilifères. Dans l'arsenal des docteurs et des scribes, aucun christ capable de lutter contre cette Bête-là, contre ce Dragon de pourpre et de fer dont la queue s'appuyait sur la pointe des îles britanniques. Des trois sectes qui se partageaient la Judée, deux sont avant tout des partis politiques. Nous défalquons les Esséniens qui, vivant reclus, peu nombreux en somme et plus vénérés que puissants, goûtent, au milieu des pires tourmentes juives, les douceurs de la vie agreste et de la retraite volontaire. Les Saducéens sont un clan de grandes familles, une caste plutôt qu'une secte. Tout leur est bon, le grec et le romain, pourvu qu'ils soient aux places, et que, faisant le sanhédrin, ils le gouvernent. Juifs d'abord, cela est évident, mais de sentiment patricien, étrangers au peuple et cherchant secours n'importe où pour posséder, conserver et conduire. Les Romains trouvèrent en eux des hommes tout prêts à partager les profits et à contenir par en haut ces bourgeois de Pharisiens qui d'en bas, appuyés sur la masse, montaient à Tassant des charges et gagnaient chaque année quelques échelons. Certains de ces Pharisiens, plongeant dans le peuple par les racines, avaient fini par se nouer avec lui, épousant ses haines, compatissant à ses misères, s'enfonçant en terre juive profondément pour y pomper quelque sève inconnue. Les Pharisiens, qui professaient l'idéal patriotique de toute la nation, se fussent contentés d'un messie davidique, d'un descendant quelconque de ce Napoléon juif à qui Iahvé avait fait de si magnifiques promesses. Un héros guerrier qui ne pactisât point avec Rome eût suffi à toutes leurs ambitions, et même ils lui eussent pardonné quelques-uns des vices d'Hérode pourvu que sa filiation fût régulièrement établie. Voilà le messie qu'attendaient la plupart des Juifs messie capable de plusieurs choses réservées à Iahvé. Le Dieu des Juifs n'avait certainement pas son compte dans ce messie-là, mais les Pharisiens y eussent trouvé le leur. Ils n'en entrevoyaient pas d'autre qui pût leur rendre le gouvernement du Temple passé aux Saducéens. Que d'horribles visions Rome avait réveillées ! Le Temple pillé sous Antiochus Epiphane, les sacrifices abolis pendant plus de trois ans, la circoncision défendue, et, chose pire que tout, la plus impure des bêtes, le pourceau sacrifié sur l'autel au lieu de l'agneau sans tache ; un second Temple bâti dans Héliopolis, comme s'il y avait deux Iahvé, deux peuples juifs ! Jérusalem assiégée de nouveau sous Hircan, cet Hircan obligé de violer la tombe de David qui contenait trois mille talents pour en donner trois cents à Antiochus, et achetant le salut de la ville au prix d'un sacrilège ; Pompée emportant le Temple d'assaut, les sacrificateurs immolés en vaquant aux choses saintes ; les barbares pénétrant dans le Saint des Saints, violant Dieu ; le chandelier, les lampes, la table d'or, les vaisseaux d'or pour les encensements, les parfums, le trésor sacré, souillés par leurs regards profanes ; tout l'or du Temple, avec les deux mille talents que Pompée n'aVait pas pris, enlevé par Crassus ; Jérusalem assiégée de nouveau par Félix, puis par Antigone, prétendant assisté des barbares, et cette fois, la bataille livrée en plein marché, le camp ennemi posé en plein Temple, la ville occupée par les Parthes ! Pour comble de misère, Jérusalem assiégée par Hérode pendant cinq mois avec l'appui des Romains ; le roi de Judée obligé de conquérir sa capitale sur d'autres Juifs, puis de défendre le Temple contre l'indiscrète badauderie des troupes romaines associées à sa victoire ! Enfin ne suffisait-il pas d'avoir des yeux pour comprendre qu'Hérode, le dernier roi qui méritât ce titre, n'avait pu constituer son royaume que par la grâce d'Auguste succédant à celle d'Antoine ? La Judée ne se survivait à elle-même que par la pitié des Romains. III. — LE REFUGE DU FANATISME. Blessé par ces spectacles offensants, le fanatisme s'était réfugié soit en Galilée, la vieille Terre promise, la terre de lait et de miel, la terre de vin et d'huile, le Jardin et le Grenier de la Judée, soit dans les districts forestiers de TransJordanie. Vaillants, batailleurs même, ici bateliers habiles, là rudes bûcherons, les Galiléens étaient bien près de considérer le Carmel, qui avait été à eux avant d'être aux Tyriens, et le Basan, le Basan surtout, comme leurs montagnes saintes, rivales du Garizim samaritain et de Sion. Supportant mal les limites que la politique leur avait assignées, ils aimaient à franchir celles que la nature leur dessinait entre la Phénicie qui leur cachait la mer, les montagnes qui leur barraient la Syrie, le Grand Champ qui les séparait de la Samarie, le lac de Génézareth et le Jourdain qui les baignaient à l'orient. L'idée messianique flambait en Galilée, l'attaque et la fuite étant plus faciles à cause de la montagne au nord, et du désert à l'est. Jamais de révolte au sud, serré entre les légions de Césarée et celles d'Egypte, point de refuge dans les villes du littoral toutes grecques ou toutes phéniciennes et qui avaient l'horreur du Juif ; l'émeute gronde toujours dans le pays adossé aux cavernes et aux forêts du Liban, et qui s'ouvre à l'Orient sur l'immensité du désert. Le bûcheron avec sa cognée, le pêcheur avec sa rame, le moissonneur avec sa faux, voilà les soldats de l'idée ; leur cœur se soulève quand une cuirasse romaine fait une lueur de cuivre sur le fond vert des oliviers. La grande voie qui monte vers Damas traverse le pays avec sa cohue de marchands païens où qu'on se tourne, c'est Satan qui passe. Il n'y a pas là que des paysans exaltés. La Galilée n'avait point cessé d'être un repaire de brigands, toujours bien armés de belles armes qu'on trempait au Jourdain. Hérode qui très jeune en avait eu le gouvernement, du temps de César, avait fort agi contre eux, et laissé le souvenir d'un homme qui entendait mal la liberté du pillage. Et plus tard, la figure d'Hérode fut l'épouvantail des montagnards galiléens, un croquemitaine pour les enfants de cette gent émeutière et dévotieuse. C'est en Galilée qu'Hérode avait grandi dans l'esprit des Juifs et s'était insinué dans la confiance des Romains, allant au-devant du tribut par des cadeaux, achetant la couronne sur les produits de la contrée. C'est par la Galilée qu'il rentra en Palestine, quand de Rome il revint roi. Il retrouva les mêmes hommes de caverne, à qui l'air de l'indépendance semblait aussi important qu'à Hérode la couronne de Judée, bandits luttant à force ouverte contre tout le monde Romains, Tyriens, Séphoritains et Galiléens de plat pays, rebelles à tous et souvent à leurs chefs, escarpés comme leurs montagnes, altiers comme leurs cèdres il n'eut raison de ces troglodytes qu'en les murant ou en les faisant cuire. Tandis que le Temple, reconstruit par lui en la quinzième année de son règne, veillait de loin sur la religion de Moïse, il semblait, à voir les villes nouvelles et leurs monuments païens, que Jérusalem fût vouée à Auguste et la Judée au Sénat. Les vieux noms hébreux s'effaçaient de la carte et des plans ce n'étaient que Césaréon, Agrippion, Sébaste, Césarée à Sébaste un temple d'Auguste s'éleva ; à Panéas, un autre tout de marbre blanc, d'autres encore la Tour de Straton, hier rade ouverte et battue par les vents d'Afrique, devient, sous le nom de Césarée, un Pirée juif, avec un peu de la splendeur romaine, des statues d'Auguste et de Rome, un théâtre, un amphithéâtre, une ville neuve où Israël se cogne dans Rome et culbute dans Athènes. Magnifique, voire au dehors, Hérode avait comme redoré le blason juif dans les îles, dans les grandes villes de Syrie, de Grèce même. En mourant il laissera aux Juifs le souvenir d'un roi tolérant pour les païens, aux Galiléens celui d'un tyran monstrueux et, qui sait ? capable de trahir Sion pour le Palatin. Superbe en tout même en forfaits, aïeul de Barbe-Bleue, avec les neuf femmes qu'il eut, fécond en assassinats, personne ne fut plus criminel envers ses enfants, personne n'eut d'enfants plus criminels envers leur père et envers eux-mêmes. Par le père, par les enfants, par les serviteurs, la famille d'Hérode fut l'école de toutes les cruautés. La fameuse prophétie de Jacob Le sceptre ne se départira point de Juda, ni le Législateur Moïse, image de la Loi d'entre ses pieds jusqu'à ce que le Scilo Christ vienne, avait reçu des démentis répétés. Depuis la captivité de Babylone, il n'y avait eu de Juda que Zorobabel après quoi, sceptre et Loi, tout était allé de mal en pis pour la tribu qui pourtant avait absorbé toutes les autres dans le grand nom de Judée. Le sceptre et la Loi s'étaient départis de Juda pour passer aux Asmonéens et aux Iduméens, on allait voir les Romains réclamer le serment et l'impôt. Et le Scilo ne tenait pas ! Il était temps que Iahvé suscitât un messie qui fit cesser cette abomination. C'était bien le moins qu'avant de régner sur les autres hommes le Messie qu'on pourrait appeler constitutionnel, commençât par délivrer les Juifs des Hérodiens et des Romains. On se fût contenté de celui qui aurait commencé par là, un messie libérateur du territoire, Hérode n'étant au fond qu'un préposé de la puissance romaine, vivant à la romaine, le plus souvent hors de Jérusalem ou dans des villes façonnées à la romaine, avec des théâtres et des cirques. Les Juifs, qui avaient le sentiment national, regardaient ce roi nominal comme un vendu, un fermier-général couronné, un roi-publicain. Il y eut de la poussière messianique au-dessus du Jourdain on en était comme aveuglé. Chacun put espérer se faire roi-prophète pour commencer. Pour détourner les prophéties de leur sens, il suffisait d'en effacer la date. Alors elles revivaient, rajeunissaient. Les plus vieilles, n'ayant plus d'âge, redevenaient fraîches, dataient d'hier, bonnes pour aujourd'hui et pour demain. Point de Juif de basse naissance qui n'y pût trouver une phrase pour lui, passer ainsi de la charrue à l'épée, sauter de l'étable au palais. Un berger, un gardeur de moutons pouvait, sans ridicule, jeter son bâton au vent et lever des hommes pour assaillir le trône vacant de David. Il y avait toujours dans le village de petits prophètes assez grands pour lui trouver les signes et le proclamer Oint. Messie d'occasion, l'occasion en débarrassait la terre. Coq de village, il perdait la crête au village voisin où se levait un autre messie combats de coqs. Le pauvre messie, les yeux crevés, les pattes en sang, gisait devant la haie qui donnait de l'ombre à ses bêtes. IV. — JEHOUDDA LE GAULONITE. En ces temps désespérés, Auguste étant maître du monde, un homme de la tribu de Lévi, nommé Jehoudda eut des Révélations. Il était du même sang qu'Abia, fils de Samuel, et, d'autre part, il descendait du roi David. Juif complet, il pouvait prétendre à la grande-prêtrise et à la couronne. Né dans un bourg de Gaulanitide, Gamala, nid de vautours haut perché sur la rive orientale du lac de Génézareth, il avait grandi sous Hérode, sa famille avait souffert d'Hérode, gouverneur de la Galilée, elle souffrit d'Hérode, roi de Judée, elle souffrira de tous les fils d'Hérode l'ennemi, ce n'était pas seulement César, c'était Hérode, l'esclave iduméen affranchi par Rome. Ces Iduméens n'avaient embrassé le judaïsme que par force sous Hircan c'étaient des profanes et des usurpateurs. On a accusé Antipas, père d'Hérode, d'avoir adoré Apollon dans Ascalon. Iahvé retirait sa main de son peuple, et il semblait que, condamnant tous les prophètes qui promettaient aux Juifs l'empire du monde, il n'écoutât plus que la voix de Balaam, ce misérable devin de Chaldée. Une fureur jalouse s'alluma dans le cœur de Jehoudda lorsque, crevant les murs du vieux Temple, Hérode édifia le Iahvé-Palace qui fit l'admiration de tous les Juifs jusqu'à la chute de Jérusalem. Jadis face à l'orient, l'entrée était maintenant au sud, tournée vers le pays natal d'Hérode. Israël passait après Edom. La terrasse orientale, l'aire sacrée sur laquelle s'élevait le Portique de Salomon, c'était maintenant la Cour des Gentils. Les païens foulant aux pieds la terrasse par où le soleil entrait dans le Temple, quelle impiété ! Plan, élévation, contenance, tout cela était dans Ezéchiel ; de quel droit, changeant le sens de la construction, l'iduméen faisait-il de l'entrée principale une porte de côté, de l'aire aux Juifs une cour de Goym ? Moïse avait tourné le tabernacle vers l'orient, afin qu'à son lever la gloire du Seigneur y lançât ses premiers rayons ; Hérode avait trahi la Loi en le plaçant face au sud, et les prêtres avaient laissé faire ! Au lieu de présenter la figure à l'occident pour adorer, comme le voulait Ezéchiel, on allait la présenter au nord. Ce jour-là, le Seigneur devint, comme dit l'Évangile, la pierre que les bâtisseurs ont rejetée, et le Temple hérodien fut la maison maudite sur laquelle il avait à venger l'affront qui lui était fait. V. — LA RÉVÉLATION DU VERBE-CORPS. Evincé du trône et de l'autel par Hérode, entraîné par les doctrines d'un certain Joshua ben Peraia, dont on ne sait rien sinon qu'il était versé dans toutes sortes de kabbales[3], Jehoudda chercha le sens secret des Ecritures juives, le sens de derrière la lettre, celui qui échappait aux Saducéens ou que les Saducéens ne voulaient pas voir. A côté de la Loi, des Prophètes et de quelques livres historiques, comme les Rois, il y avait des livres hermétiques, joanniques, des livres d'initiation à certains mystères des Écritures. Ce sont les Livres d'Ieou ou Iaô[4], c'est-à-dire les Révélations d'Iaô à ses Iaôannès — d'où est venu le nom de Joannès — depuis le commencement du monde, avant et après le déluge. Ces livres avaient été faits à l'imitation des livres chaldéens de même nature, avec cette différence que toutes les Révélations d'Iaôannès étaient à l'avantage des Juifs, et on ne les conçoit point autrement. Jamblique parle de vingt mille discours placés sous le nom d'Hermès ! Les Juifs n'en avaient mis que deux ou trois sous le nom d'Iaôannès. C'était peu, mais grâce à leur industrie, tout le christianisme en est sorti. Dans tous ces Livres même définition de Ieou, la lumière universelle, qui deviendra Iaou, Iahvé, Iaoua, Jehovah ; même définition de son Fils, le Théanthrope solaire, qui deviendra le Fils de l'homme de l'Apocalypse et le Jésus de l'Evangile. Tout ce que le Verbe dira dans l'Apocalypse Je suis le commencement, le milieu et la fin ; je suis celui qui est, qui a été, qui sera ; je suis l'Aleph et le Thav l'Alpha et l'Oméga des traductions grecques, vient des Livres de Iâo. Le Joannès de l'Apocalypse n'a fait que transcrire sur le papyrus ce que les ouvriers égyptiens stylés par les prêtres avaient partout gravé dans la pierre. Les variations du Quatrième Évangile sur le Verbe procèdent de ces formules éternelles[5]. Sur les stèles, le Soleil est le Premier-né, le Fils de Dieu, le Verbe de Dieu. Sur une muraille du temple de Philœ, sur la porte du Temple de Medinet-Abou, on lit, tracée quinze siècles avant Jehoudda, la définition du Verbe par le Quatrième Évangile C'est lui qui a fait tout ce qui est, et rien n'a été fait sans lui jamais[6]. Quoi de plus clair que cette définition, et comment ne pas voir immédiatement dans Jésus la personnification allégorique du Théanthrope solaire ? A qui les scribes essaient-ils de faire croire que Jésus est la véritable lumière qui éclaire tout homme venant au monde, que ce monde même a été créé par lui, s'il n'est lui-même le Verbe incarné ? Je m'adresse aux gens de sens rassis et je leur demande s'ils pensent qu'un Juif ait paru sous Tibère, disant de lui-même Je suis la lumière et la vie, sans que les autres Juifs engagés dans cette solennelle proposition n'aient immédiatement compris que ce personnage était descendu tout exprès du ciel pour la démontrer par des miracles allégoriques. Appuyé sur la vieille cosmogonie chaldéenne, sur l'astrologie et sur les Ecritures, Jehoudda codifia en quelque sorte la superstition du Christ céleste. Que le Christ fût un Verbe-corps, on n'en saurait douter quand on le voit converser dans le Paradis terrestre avec Adam et Eve, avec Caïn, avant, pendant, après le déluge, avec Noé, avec Abraham, avec Moïse et avec tous les prophètes. Que l'homme fût à sa ressemblance, on en pouvait douter quand on regardait un païen, mais on en était sûr quand on regardait un Juif. Moïse a vu quelqu'un et qui lui a parlé. Le Père ? Non. Qui eût commandé au monde pendant que le Père parlait à Moïse ? Mais le Verbe du Père. Et le Verbe est de chair puisque le Père est vivant. Sa chair est de feu, comme celle du Père. A la fois corps et feu, Homme de feu en un mot. Jehoudda le vit assez distinctement pour décrire sa forme, sa figure, ses vêtements, ses outils et ses armes[7]. Entre Juifs on l'appelait le Fils de l'homme comme s'il était de la famille, et en effet il en était le chef. Ces idées nous étonnent, nous avons peine à croire qu'il se soit trouvé des mortels pour les professer. S'ils pouvaient revivre, c'est nous qui les étonnerions. Dieu est chair ab æterno ! s'écrie Apollinaris, au quatrième siècle. Et Rien n'est uni à Dieu comme la chair du Christ ![8] Il est distinct du Père, puisqu'il est son Fils, et bi-sexuel, puisqu'Adam, formé à son image, était mâle et femelle[9]. Sans doute Adam n'était pas de la même substance, puisqu'il y a en lui de la terre et de Peau, mais il avait été créé immortel et il vivrait encore, s'il n'avait point écouté Satan. Le Christ peut refaire ce qu'ont défait Adam-Eve et Satan. Le Père n'a qu'à le lui commander, et il rendra l'immortalité aux Juifs. VI. — LE MILLÉNARISME. A l'instar des Mages Jehoudda estimait que Dieu avait divisé son Œuvre en Douze Cycles millénaires divisés eux-mêmes en deux groupes de six mille ans, — l'un avant, l'autre après la création de l'homme, — de manière que la consommation de l'Œuvre, l'homme compris, fût renfermée dans les Douze Cycles. Jehoudda n'inventait rien. Il empruntait ses grandes lignes aux Genèses chaldéennes. Celle des Hébreux n'en est qu'une version plus ou moins fidèle. Ces thèmes de Création et de Consommation admettent que la Genèse a pris six jours, et que dans ce calcul mille ans sont comme un jour et un jour comme mille ans. Ayant été créé le sixième jour, Adam représentait à lui seul le septième Mille, et il aurait vécu éternellement si sa moitié féminine, séparée de lui par Dieu, n'avait pas cédé au Serpent faute irréparable qui avait amené Dieu d'abord à chasser le couple du Ciel-sur-terre ou Paradis terrestre, et ensuite à noyer ce Paradis dans le déluge. L'Arbre de l'Eden était éternel, et c'est pour avoir mangé de son fruit qu'Adam n'avait pas atteint mille ans. Le jour où tu en mangeras, tu mourras, lui avait dit Dieu. Ainsi l'entend Isaïe lorsqu'il prédit un ciel nouveau, une terre nouvelle et le retour des jours de l'Arbre les jours de mon peuple seront comme ceux de l'Arbre, des jours de mille ans[10]. La Juive que, moins d'un siècle après la mort de Jehoudda, Juvénal décrira lisant dans les lignes de la main, interprète de l'Arbre, dit-il, c'est la millénariste du pavé de Rome sous Domitien. Certains Psaumes de David s'inspirent de la même théorie[11], point de départ de tout le christianisme. L'Eglise a rejeté du canon la Lettre de Barnabé d'où il résulte que le millénarisme était la doctrine dominante des temps apostoliques, mais nous avons mieux que la lettre de Barnabé ; dans l'Apocalypse nous avons le manifeste des apôtres, et la Lettre de Pierre est d'un millénariste imbu de la tradition jehouddique. Sur les six premiers Mille correspondant aux six premiers jours, tous étaient d'accord, même ceux qui assignaient treize, quatorze ou quinze mille ans à la durée du monde. En restant avec les Chaldéens et les Sabéens, Jehoudda s'enferme dans le cadre duodécimal qui lui est imparti par le cours du soleil à travers le Zodiaque douze signes, douze mois, douze cycles. Ces six mille ans avaient été des temps de lumière, gouvernés par les bons principes, et ils étaient représentés sur le Zodiaque par les signes du printemps et de l'été. Ils étaient dits Mille d'Ieou, ayant commencé avec l'Agneau, signe du passage, pesach ou pâque du Soleil dans notre hémisphère, et fini avec la Vierge, en englobant le Taureau, les Gémeaux, le Cancer et le Lion. C'est entre le sixième signe et le septième que le Monde avait commencé. Or les six Millenia assignés à ce Monde étaient en cours, gouvernés par les mauvais principes, ceux de l'automne et de l'hiver, et représentés sur le Zodiaque par la Balance, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Zachû Verseau et le Zib Poissons. Ils étaient dits Mille du Serpent ou de Satan. En effet, c'est entre la Vierge et la Balance que se trouve placé sur les sphères le vilain Serpent céleste, père des ténèbres, qui chaque année recommence ses méfaits et, chaque année aussi, s'enfuit vaincu quand le soleil passe sous l'Agneau, signe du Christ réparateur du mal du monde. Ce Serpent était fort chaldéen, car les Juifs ne se sont pas bornés à dépouiller leurs voisins de leur Dieu, ils les ont dépouillés de leur Diable. C'est Satan qui a tenté Eve, et qui momentanément a battu Dieu. Le ciel a eu avec la terre des relations directes qu'Adam a connues, mais que sa faute a interrompues et le déluge brisées définitivement. Dieu renouera-t-il jamais ? Ce monde a déjà eu bien des aventures. De premiers cieux ont existé, et une première terre tirée de l'eau et se tenant par l'eau, grâce au Christ[12]. Ils ont fait naufrage sous l'effort de la cataracte diluvienne, et ils ont été remplacés parles cieux et la terre dont on jouit sous Hérode Dieu se propose de purifier cette terre par le feu et de la replacer dans la lumière originelle. Il n'a pas pu faire durable une Œuvre sur laquelle les Juifs ne règnent pas définitivement. C'est à recommencer. Ainsi ce qu'attendait Jehoudda, c'est un troisième Monde, une troisième terre surmontée d'un autre ciel, celui d'alors étant visiblement raté, puisque la lumière propre à Dieu ne le traversait pas d'une manière régulière et continue. On vivait sous un ciel qui gardait encore les traces des épreuves passées et portait la marque de puissances hostiles. Ce ciel, lui aussi, empêchait le Christ de revenir, c'était plus qu'un voile, c'était un obstacle. Car toute la voûte, c'est-à-dire la couche la plus rapprochée de la terre, était aux mains de Satan et de ses, anges qui faisaient un véritable abus de cette mitoyenneté contre les Juifs. Au-dessus du ciel de Satan il y en avait deux autres, stratifiés. L'un était occupé par l'armée de Dieu à laquelle commandait en chef le Christ-Verbe, entouré des Douze Cycles de Mille ans ou Apôtres[13], ayant sous leurs ordres Trente-six Chefs ou Décans[14], avec douze légions de douze mille anges chacune, formant ensemble Cent quarante-quatre mille puissances qui participaient de la divinité. L'autre, le troisième ciel, était plus spécialement affecté à Dieu, qui y avait son trône et son sanctuaire, et vivait là. Père de toute lumière, au milieu de Vingt-quatre Vieillards ou Presbytres qui représentaient les Vingt-quatre Heures de l'heureux temps où le jour était sans nuit. C'est là sa famille éternelle et son éternel ministère. Les Hébreux se rattachèrent à cette organisation par les douze tribus auxquelles président d'en haut les Douze Apôtres. Les Juifs de bon jugement reconnaissent volontiers qu'il n'y a jamais eu douze tribus[15], mais un certain nombre de clans placés sous la protection des douze signes. Le Père des Juifs, c'est Iahvé, père du Christ, Sujets de Iahvé, enfants du Verbe, par conséquent supérieurs par essence à toutes les nations, tels sont les Juifs dans la pensée créatrice, donc telle est la Loi. Qu'était-ce donc que l'Apocalypse de Jehoudda ? Celle de Jacob et de ses douze fils, celle de Joseph chez Pharaon. Joseph, cet accapareur de grâce et de grains, avait vu, dans une zodiacale vision, le Soleil, la Lune et onze étoiles qui l'adoraient, lui douzième. Qu'est-ce à dire, sinon que le ciel ne s'allumait que pour éclairer la marche des Juifs à travers le monde ? C'est de Joseph que Moïse et Aaron tiennent tout ce qu'ils savent. Toute leur Apocalypse, ce sont les Juifs sauvés sous l'Agneau, les païens détruits. Lisez l'Exode avec quelque attention[16], et si dépourvu que vous soyez de sens critique, vous verrez que la pâque juive n'est nullement une institution mosaïque, mais un signe de la prédestination. Au milieu des Égyptiens, les Israélites oubliaient leur vieille religion de Mésopotamie, et le sacrifice annuel de l'agneau, symbole du pacte d'éternité que Iahvé avait fait avec eux. La pâque est un rappel de l'Agneau, le signe astrologique sous lequel le Christ a donné le monde aux Hébreux. L'année ne commence le 15 nisan que par application de ce principe[17]. Ce jour-là le Seigneur passe, et ainsi repassera-t-il jusqu'à ce qu'il ne passe plus. C'est le passage du Seigneur et nullement celui de la Mer Rouge, on n'en est pas encore là. Le Seigneur passe la nuit du 14 au 15, et on la passe avec lui, bâton en main, comme des passants. L'agneau est blanc, les pains sont sans levain à cause de la pureté originelle ; la pâque dure sept jours parce que la Création en a pris sept. Ce n'est pas une fête de circonstance, c'est la fête du passé engageant l'avenir. Le mot pesach est chaldéen, comme nisan et les autres mois, comme Zachû Verseau, Zib Poissons et les autres signes, et comme est chaldéenne l'économie des Douze Cycles millénaires. Les deux Tables du témoignage que Iahvé donne à Moïse, il ne faut point les confondre avec les tables de la loi. Les deux Tables écrites des deux côtés par le doigt de Iahvé sont le Livre des destinées du monde et le Livre de vie. Un côté regarde le ciel, un autre la terre[18]. Pourquoi Moïse brise-t-il ces deux Tables devant les Juifs au pied de la montagne ? Parce qu'ils sont indignes de ce qu'on y lit, ayant adoré le veau d'or. Pardonnez-leur cette faute, dit Moïse à Iahvé, ou si vous ne le faites pas, effacez-moi de Votre Livre que vous avez écrit. Le Seigneur répond J'effacerai de mon Livre celui qui aura péché contre moi ; et au Jour de la vengeance je visiterai et punirai ce péché qu'ils ont commis[19]. VII. — LE RETOUR DE L'AGNEAU. Le Père a décidé que le monde finirait avec le Douzième cycle. Mais il y a une clause secrète pour les Juifs. Les Juifs sont les enfants de Dieu, le Père anéantira-t-il sa famille terrestre ? Grosse question, résolue déjà dans les conseils du troisième ciel. De même que Jupiter est dit Stator, Capitolin, Ammon, Tonnant, selon les cas, le Christ était dit Iehoschoua — mot hébreu qui signifie Sauveur, dont les Grecs ont fait lésons, et nous Jésus —lorsque, dédaignant toute autre besogne, il se consacrait spécialement à la défense des Juifs. Tout-puissant pour la destruction, il est tout-puissant pour le salut. C'est celui-là qu'enverra le Père. Ce que Moïse cache aux profanes, c'est le secret de cette prédestination secret fort mal gardé que tous les Juifs ont pressenti. Ce qu'Aaron demande à Iahvé, quand il lui immole l'agneau du passage, c'est de tenir la promesse qu'il a faite aux Hébreux de les épargner au Jour de la colère et de leur sacrifier les nations. Le costume du Grand Prêtre lorsqu'il se présente devant Iahvé, c'est le rational du Jugement, le Jugement confectionné, rédigé d'avance, lisible dans le ciel comme il l'était sur les deux Tables. Ce Mage, car c'en est un, porte, gravé aux épaules sur deux sardoines et répété sur douze pierres précieuses, le nom des Douze fils de Jacob, chefs des douze tribus, car les deux sardoines représentaient l'une le Soleil et l'autre la Lune, et les Douze pierres les Douze signes du Zodiaque, comme les Douze Pains de proposition représentaient les Douze Cycles de l'Œuvre, et le Chandelier à sept branches les Sept planètes. Ce prospectus astrologique, c'est la vision de Joseph[20]. Le Grand Prêtre ainsi vêtu, c'est le Livre des Destinées du monde, côté terre. Le côté ciel, c'est, encore plus juif que le Grand Prêtre, le Christ par lequel a été créé le monde. Il sera de la fin comme il a été du commencement, l'Aleph et le Thav[21]. Chaque année à Pâque on sacrifie l'agneau ; mais l'Agneau de Iahvé, l'Agneau divin qui est à nos agneaux ce que le Christ est à un Juif, l'Agneau astral, en un mot, ne meurt pas. Chaque année à l'équinoxe du printemps, il semble mourir et chaque année il renaît. Il est le principe et la somme de tous les agneaux sacrifiés depuis la première Pâque. Il est l'image du peuple juif, jusqu'ici la victime des nations, mais viendra l'Agneau de la revanche. Agneau, Pâque, Christ, c'est la même idée d'éternité. On disait du soleil pascal L'Agneau est revenu. Dans l'Apocalypse, l'Agneau est représenté sacrifié — c'est-à-dire en croix, tel qu'on le dressait pour la cuisson — au milieu des quatre points cardinaux de la sphère. Il est donc le signe du Christ étendu sur la croix céleste à l'équinoxe du printemps. Dès que ce signe apparaîtra sur la montagne de Sion, les douze tribus, reconnaissant leur marque de fabrique, marcheront à lui et l'environneront, prêtes à le suivre partout. Pour cette raison Jehoudda appelle les christiens disciples de l'Agneau. C'est le nom qu'on aurait pu donner, nonobstant leur idolâtrie, aux Juifs qui, du temps d'Ezéchiel, avaient représenté l'Apocalypse nationale sur les murailles intérieures du Temple. Car ils avaient peint toutes sortes de figures et de bêtes immondes, et toutes les Idoles de la maison d'Israël[22], c'est-à-dire les douze signes du Zodiaque et les Douze patriarches célestes, les Douze Apôtres du Christ, prototypes immortels des douze tribus. Et dans le Temple même on avait vu des femmes assises pleurant la Passion de Thammouz — c'est Adonis — comme les bonnes et aussi les mauvaises femmes d'à présent pleurent la Passion de Jésus le Vendredi saint[23]. Puisque le Fils de l'homme devait venir des cieux, c'est qu'il y avait un domicile, car s'il est vrai que, dans l'Evangile, il n'a sur terre aucun endroit où reposer sa tête, il habite au ciel un logis magnifique le Soleil qu'il emporte dans l'espace comme l'escargot entraîne avec lui sa coquille. Certes on ne peut pas dire que le Soleil soit proprement le Christ, mais il est sa lumière promenée, son tabernacle mobile[24]. Logé dans le Soleil, nourri de sa substance, vêtu de sa lumière, le Christ a douze maisons, douze mansions plutôt. Toujours on a comparé la course annuelle du Soleil, croissant et décroissant selon la saison, à la vie d'un homme qui naît et croit, décroît et meurt avec le temps. Il y a, vous le savez, un moment où la comparaison cesse d'être juste si elle l'était tout à fait, il n'y aurait plus de terre. Conçu sous la Vierge à l'équinoxe d'automne, enfant au solstice d'hiver, le Soleil est adulte lorsqu'il passe dans les Poissons, vers mars, mais quand, franchissant la ligne équinoxiale, sous l'Agneau, il entre dans notre hémisphère, il apparaît vraiment comme l'image sensible de Dieu, et le Roi des Rois, le Seigneur des Seigneurs de la terre lesquels n'ont pu se croire quelque chose qu'en son absence. Je ne veux pas vous atteler avec moi à son char, mais tenez pour certain qu'Hercule, Bacchus, Osiris, Mithra et presque tous les dieux y étaient déjà lorsque les évangélistes y firent monter Jésus. Sous tous les masques qu'il prend on voit étinceler ses regards de feu. Les Egyptiens l'adorent enfant, les Grecs homme, on le célèbre à la moisson, aux vendanges. On le chante dans les jours du printemps et de l'été, on le pleure dans les mélancolies de l'automne, on l'espère, disent les Marseillais, dans les intimités de l'hiver. Des siècles et des siècles avant que les Juifs ne rappelassent ou Schilo ou Messiah ou Ieschoua, l'Orient ne connaissait, au-dessous de l'Invisible, d'autre dieu que l'Invaincu, l'éternel tisseur de lumière. Le mystère que les prêtres cachent au fond de leurs tabernacles, c'est ce faux mystère dont tout le monde a la clef. Partout, depuis que l'homme a des yeux pour voir le jeu tournant des nuits et des jours, on tient que le Soleil naît de la substance divine à une date qui correspond à notre 23 décembre. Partout on vénère la céleste Vierge dont les flancs immaculés donnent ce beau fruit. Point de doute nulle part, celui-là est bien né des œuvres de l'Invisible. Le joli enfant ! vit-on jamais de plus beau sourire et des formes plus pures ? Que l'image de cette Vierge féconde se dresse dans les temples et sur les places ! Et que chaque homme en passant s'incline devant la mère immaculée qui presse sur son sein cet Enfant dont on ne nomme le Père qu'avec un tremblement dans la voix ! Qu'on l'appelle Horus ou Adonis, Atys ou Bacchus, Apollon, Sérapis ou Christ, qu'on le fête au moment de sa naissance ou de sa maturité, c'est toujours le Soleil, .père du temps, qu'on adore, le dieu aux mille noms, dit Orphée. Qu'il meure comme Adonis, blessé par un sanglier, ou comme Apollon, par le serpent Python, ou comme Osiris par Typhon, ce sont des Passions héliaques sur lesquelles on se lamente dans les mystères et d'éclatantes Résurrections qu'on célèbre. VIII. — LE ZIB LES POISSONS SIGNE DE GRÂCE. Mais le jour vient où l'Agneau ne passera plus, où il ne sera plus en croix. Il y a trop longtemps qu'il s'immole au salut de la terre ! Il ne fera plus ce sacrifice annuel, il brisera le thav, cette croix sur laquelle il passe depuis le commencement du monde. La grosse affaire pour les Juifs, c'est d'être dans les bras du thav, au delà duquel il n'y aura plus rien qui ne soit à Iahvé. Dans l'écriture juive — au propre et au figuré — la lettre suprême, c'est la dernière lettre de l'alphabet hébreu, c'est le Thav et le thav est une croix. La croix de l'Agneau, ou, si vous préférez, l'équinoxe du printemps, c'est le monde en équilibre périodique. C'est à cet équinoxe que l'équilibre se rompra. Mais cette rupture aura lieu au bénéfice des Juifs. Le Grand Agneau verra l'Accomplissement des temps, la Descente et la Victoire du Christ Jésus. Il faut donc être en deçà de la ligne, du côté du Zib. Les Poissons passés, il sera trop tard. Les Poissons étaient donc au premier et au dernier rang des signes du Zodiaque engagés dans le thème christien au dernier rang, parce qu'ils sont le Mille sous lequel Satan, chef des nations, devait être anéanti par le Christ ; au premier rang, parce qu'ils sont le signe précurseur de l'Agneau sous lequel devait commencer le Royaume de Dieu. L'idée du baptême rédempteur était inscrite au ciel dans le Zib. Il convenait que les Juifs fussent de ces Poissons-là. La première condition du salut pour un poisson, c'est d'être dans l'eau. Cette idée, fondement de la pisciculture, est également celui du baptême. Toute l'eau du ciel s'étant épuisée dans le déluge et le monde devant périr par le feu, il n'y avait de remède que dans l'eau sourdant de la terre, pour cela nommée eau vive. De là le caractère sauveur des sources comme celles du Jourdain, et des fontaines comme Siloë, Ænon, Kapharnahum. Contre le Christ la Terre est sans défense, masse énorme, mais immobile et faite pour recevoir ses coups sans pouvoir les rendre. Immobile, je le répète, comme le piédestal de cette croix mouvante qui est le Christ passant par les quatre points cardinaux. Sans la croyance à l'immobilité de la terre, point de croix, et point de Christ[25]. Car sur quoi s'appuiera la croix, et où le Christ posera-t-il le pied si la terre est ronde et qu'elle tourne[26] ? Iahvé négligea d'avertir Jehoudda que la terre était ronde et mobile. Quelle déception en effet si le Fils de l'Homme, au lieu de mettre pied à terre en Judée, allait descendre aux antipodes de Jérusalem, en un lieu où des hommes incirconcis auraient eu les pieds en haut et la tète en bas ! Jehoudda ne se demanda point par où les astres auraient accompli leur révolution si la terre eût été infinie, et il fut convenu que, devant les Révélations positives de Iahvé, on mépriserait profondément les sciences naturelles et physiques, source de tous les maux qui affligeaient les Juifs. On ne saurait en vouloir aux christiens d'avoir ignoré les formes du monde et les lois créées par Dieu. Beaucoup de savants païens et fort honnêtes pensaient là-dessus comme les Juifs. Lucrèce a soutenu qu'il n'y avait point d'antipodes et que le soleil n'était pas plus grand au ciel qu'il ne paraissait à l'œil. Cette thèse n'a rien de scandaleux dans la bouche d'un homme qui n'y mêle pas Dieu. Mais c'est un blasphème chez des gens qui disent Le dieu qui nous a révélé ces belles choses est le vrai Dieu, et qui ne tarderont pas à ajouter Si vous ne le croyez pas, nous vous tuerons de sa part. Le dieu qui a créé les lois de la pesanteur, de la gravitation et de l'attraction, et qui, semble-t-il, est le vrai Dieu, ne leur avait rien révélé du tout. S'il inspira des hommes sous Auguste, ce sont les païens sectateurs de Pythagore et d'où sont issus les Strabon et les Ampélius, que Jehoudda exclut du salut. La science antique nous a été volée pendant l'invasion christienne ; les paroles de Dieu à ses vrais enfants, les philosophes, ont été submergées par le flot des paraboles juives. Mais ils sont nombreux ceux à qui il avait dit à l'oreille Attention ! Je vous emporte à votre insu dans un mouvement rapide. La terre n'est point immobile dans le monde, ni le monde autour de la terre. Vous tournez autour de corps qui tournent autour de vous[27]. N'allez pas vous figurer que je descendrai un jour pour faire votre connaissance, et surtout ne m'insultez pas au point de croire que j'enverrai pour juger les hommes un petit Juif de Gaulanitide qu'on va crucifier sous Tibère pour crimes de droit commun. IX. — LA GRANDE ANNÉE, LE GRAND JOUR. L'Apocalypse de Jehoudda résultait et d'une tradition exaltée par le zèle religieux et d'un plagiat astrologique corroboré par quelques observations. Outre les Douze signes, les Sept planètes jouaient un rôle éminent à raison de la situation qu'elles occupaient au début du monde. Lorsque l'état du ciel les, ramènerait à leur point de départ, le Christ prendrait lui-même la direction des Douze Apôtres, et cette Année-là c'en serait fait de Satan qui gouvernait l& monde contre les Juifs[28]. Quand viendrait la Grande Année, le Mille du Zib, comme disait Jehoudda ? En l'an de Rome 739, il estimait qu'environ cinq cycles s'étaient écoulés depuis Adam, et que le Mille en cours ou Mille du Sachû le Verseau finirait avec le 14 nisan 788[29]. Le Douzième mille ou Mille du Zib commencerait le soir même et le Christ viendrait avec l'Agneau de la pâque. Toutefois il ne fallait pas que les Juifs s'imaginassent éluder le Jugement. Les Douze Apôtres jugeraient les douze tribus. Sur le Jugement de Dieu, toutes les Écritures s'accordaient. L'idée pouvait effrayer, elle ne pouvait pas surprendre. Moïse et les prophètes annonçaient tous cette terrible journée d'Iahvé, mais tous ne promettaient pas aux Juifs l'empire d'un monde créé exprès pour eux. Beaucoup croyaient qu'en ce jour il y aurait Fin du monde et Jugement sans appel. Il fut révélé à Jehoudda qu'avant cette solution le Christ viendrait renouveler la terre par un Jugement d'attente et pour une période de mille ans après laquelle le Père lui-même prononcerait l'arrêt définitif. Il dépendait des Juifs d'échapper à la destruction partielle en même temps qu'aux conséquences du Premier jugement, lesquelles n'étaient pas minces. En observant la Loi avec autant de rigueur contre les Juifs adultères que contre les païens, ils gagneraient le salut et régneraient mille ans avec le Christ, jusqu'à ce que vînt à son tour le Royaume éternel du Père. Ceux qui auraient abandonné cette Loi, révélée à Moïse par le Verbe, ceux-là iraient en enfer confondus avec les autres hommes — la plus dure de toutes les punitions ! Ceux qui l'auraient servie sans défaillance iraient dans l'Eden millénaire, et là ils jouiraient d'un bonheur dont ils ne pouvaient se faire qu'une faible idée, étant donné la pauvreté de l'imagination humaine. Mille ans, cela pouvait sembler long pour des esprits superficiels. Mais quoi ! le Verbe avait, au gré de sa puissance, fait vivre des hommes sept cents, huit cents, neuf cents ans, il avait modelé de ses mains Hénoch et Élie qu'il avait soustraits à la mort et transportés dans le ciel. A quoi bon pleurer le Paradis terrestre ? Iahvé pouvait le rendre à ceux qui croyaient en son Christ. Qu'était-ce, pour lui, de faire qu'on vécût en ce séjour une seconde vie égale à celle qu'avaient vécue les patriarches ? Mille ans, qu'était-ce pour celui qui avait créé le temps ? Les Juifs se plaignaient du raccourcissement de la vie, l'attribuant non au premier péché mais à ceux des générations nouvelles. Le premier péché, on l'expiait par la mort, mais celui des générations, par une diminution de longévité. Ah ! le bon temps que celui où les hommes atteignaient dix-neuf jubilés, près de mille ans ! Mais comme il a passé vite ! Quand on pensait qu'Abraham avait eu de la peine à vivre jusqu'à cent soixante-quinze ans ! Aujourd'hui on s'estimait vieux quand on arrivait à quatre-vingts ! Quelle misère ! Mais patience, voilà que Iahvé va faire périr cette terre souillée par l'existence des incirconcis, il la refera pour les Juifs seuls et leurs jours s'allongeront sans fin. Pendant tout le Mille du Zib c'est le Christ Jésus qui régnait[30]. Il coupait l'Arbre de la science du bien et du mal dont le fruit avait perdu Adam, le jetait au feu et replantait l'Arbre de vie dont le fruit était éternel. A la fin du Douzième mille, le songe de Joseph était accompli, et Iahvé se réunissait à son peuple sur les derniers débris du monde païen.
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Car rien ne peut échapper à l'œil du spectateur et pour du réalisme, on est servi... D'emblée le réalisateur sème déjà un mal être rien que par le lieu, cette morgue vieillotte plongée dans un sous-sol d'une maison déjà inquiétante et angoissante par tout ce qu'elle dégage, de sa configuration et de sa déco typiquement "ils british"...Alors pour un film d'épouvante, tout semble bien parti car l'univers à fortiori morbide par le contexte anxiogène y est déjà pour quelque chose...Ce que va révéler cette autopsie va encore plus enfoncer le clou, par toutes les particularités inimaginables que va livrer ce corps mystérieux effrayant !La suite sera un emballement de phénomènes surnaturels dont on sera par contre moins friand, ceux-ci reprenant les codes classiques du genre mais dont on ne dira mot...C'est cet aspect un peu facile qui sera décevant, quand le film quitte une tension psychologique de bon aloi pour plus d'esbroufe, en jouant sur des ressorts plus convenus. Cette articulation aurait mérité plus de nuance, plus de subtilité afin de rester sur cette longueur d'onde parfaitement lancée et maîtrisée dès le début. Et donc malgré le jeu de deux comédiens parfaitement convaincants Émile Hirsch et Brian Cox, et un point de départ original, André Øvredal ne sauve pas sa réalisation d'un certain stéréotype propre à ce type de film, d'autant plus que les explications fournies sont loin d'être renversantes et déterminantes pour nous marquer véritablement. Faire peur pour faire peur, sans doute mais quand quand le tout est associé à un minimum de réflexion comme dans le très bon et récent "Get Out" ou encore l'étonnant "It Follows", c'est encore bien mieux ! Malgré une première moitié prometteuse [dissections, découvertes, analyses, questionnements], le film s'enlise ensuite dans les clichés du genre et perd du coup sa tension originelle. On évite pas la bébête qui apparait dans le trou de la porte ou dans le miroir du couloir, la radio qui change de station, les lumières qui vacillent ou explosent, la porte qui se ferme et se verrouille toute seule, et même le pauvre chat mort ! De plus, autant Brian Cox est très convaincant, autant Emile Hirsch n'a pas toujours l'air très à l'aise dans ce registre, ses réactions à la peur sont parfois assez robotisées. Par contre les plans sont très bons, la lumière maîtrisée et la musique pas trop envahissante pour ce registre de film. Bon allez, ce n'est pas un mauvais film en soi, c'est juste qu'il n'est pas assez maitrisé et abouti, ce qui n'est d'ailleurs pas très surprenant venant du réalisateur du très mauvais The Troll Hunter. Bref, bonne idée originale de départ, mais mal exploitée... Pour la police américaine "Jane Doe" est une expression désignant une femme dont on ignore l'identité. Ce père et son fils qui vont pratiquer son autopsie ne sont pas au bout de leur surprise. Ce huis clos au sein de la morgue est tout simplement terrifiant pour les spectateurs qui aiment frissonner. Peu adepte du genre, l'ambiance angoissante m'a littéralement cloué à mon fauteuil. Sans aucun doute, le meilleur film d'horreur-épouvante vu depuis un bon moment avec deux acteurs au top Emile Hirsch et le formidable Brian Cox vu récemment dans "Churchill". Le réalisateur Norvégien du found footage Troll Hunter revient après des années d'absence sur le devant de la scène avec ""The Jane Doe Identity"" et bien que le film ne soit pas un chef d'oeuvre je l'ai trouvé relativement intéressent et intriguant . Seul bémol la surprise n'aura durée que pendant la première partie car la seconde ma complètement déçu tant on est retombé dans un schéma tout ce qu'il y a de plus classique et facile . Ce huit clos commence tel un thriller funéraire au multiple rebondissement flippant pour vite se transformer en un survival parapsychique horrifique qui ébranle .La première phase est prenante et accompli et joue avec un suspens constant qui nous maintiens en haleine .La narration est parfaite et fais office d'ordre primordial vu qu'elle entraîne le récit à coup de dévoilement autour du fameux et mystérieux cadavre qui est plutôt flippant . L'autopsie est conduit tel une enquête de Sherlock Holmes et c'est réellement le fil conducteur de l'histoire et de très loin le plus captivant . L'intrigue autour de ce macchabée et de sa dissection est totale et fais preuve d'énormément d'ingéniosité entre l’obscurcissement des énigmes, les présomption accablantes, l’illogisme des preuves établis et l’opposition constante entre le rationnel et l'irrationnel .L'image est cru et tout y est détaillé on assiste en bonne et du forme à une véritable dissection jusqu'à ce que le surnaturel pointe le bout de son nez et vienne rendre le tout très inquiétant au point de métamorphoser l'amphithéâtre médico-légal en un véritable chantier démoniaque. Et bien que le tout soit très efficace l'ont vient à malheureusement perdre l'intérêt établis durant la dernière phase à cause d'une très grosse facilité artistique plutôt troublante .En effet tout le récit perd en adresse et en perspicacité , l'enquête est complètement délaissée pour laissé place à un pseudo survival des plus banal enchaînant sans efficacité les jump-scares et autre séquence prévisible . L'intensité retombe mais on reste attentif à la révélation du pourquoi de tout cela car l'on croit à un retournement de situation des plus favorables qui fâcheusement n'arrive pas . Pire, on vient nous mettre le coup de grasse avec son final qui vient abruptement dénaturé les thématiques apposé via un raccourcis scénaristique qui en dit long sur le manque d'idée de son cinéaste , quel gâchis . Les décors sont certes moindre mais très efficace et la morgue joue un rôle essentiel voir premier à cet anxiété . Le fait qu'elle soit en plus situé dans un sous-sol ajoute une préoccupation supplémentaire ,avec son agencement sombre , rouillé et son charme désuet la morgue prend une atmosphère huis-clôt asphyxiant et oppressant . Un théâtre imparable pour l'horreur avec ses longs couloirs étroit qui viennent l'ornée .Le coup des petits miroirs dans les coin sont efficace ainsi que ses canalisations bruyante . Les divers effets sont concret et la mise en scène corrélativement simple mais ce permet quelques jeux de lumière sympathique qui créer une authentique atmosphère .L'histoire quand à elle est très bien trouver , j'ai trouvé l'enquête autour de la dépouille très original et intriguant , une véritable chasse aux indices autour d'un corps sans vie qui pourtant préoccupe énormément . Le coup du père et du fils médecin légiste est bien rechercher , tout comme la façon violente mais pourtant nécessaire de présenter la dissection et les caractéristiques improbable autour de ce cadavre . Le récit avance à bon rythme et va toujours à l'essentiel , sauf pour son final qui est trop rapide et surtout expéditif . C'est vraiment dérangeant car on a vraiment l'impression que deux personnes différentes ont travaillés sur ce projet , la première partie est soigné et l'écriture autour des séquences d'enquête est minutieuse et approfondis ; alors que la suite est quand à elle grossière , maladroite et empressée . Pour le coup il manque au moins 15-20 minutes de plus à cet histoire pour être un minimum complète . Le casting est quand à lui efficace et bien choisi , rien à redire de ce côté la . Les comédiens sont exemplaires et le duo père-fils est florissant et promet de bon moment .Brian Cox en doyen papa est efficace et apporte la maturité et le charisme aux événements ,sa présence est rassurante . Emile Hirsch qui est bien loin de son rôle Into the West de Sean Penn incarne le rôle du filston bienveillant . Les deux comparses font preuve d'une mélancolie efficace et ne délaisse pas une fois leurs interprétation malgré la baisse de régime arrivant en fin . CONCLUSION The Jane Doe Identity est un film intérressant qui promettait beaucoup mais qui se révèle au final des plus conventionnel , même si d'excellente idée demeure inclus en son histoire . L'approche visuelle est sympathique et fonctionne bien avec l'ambiance macabre , mais le plus efficace reste inéluctablement l' enquête autour des autopsies qui sont pour le moins éclatant et impitoyable . Dommage que ce long métrage n'aille pas au bout des choses . 3/5 Pas mal !!! "TROOOOLL" !!!Sept ans. Sept ans déjà que ce cri désormais culte a retenti dans les forêts norvégiennes où nous avait convié André Øvredal pour une partie de chasse aux trolls mémorable... Parfait mélange d'angoisse, de fascination et d'humour détonnant amené par l'apparence grotesque de ces créatures légendaires dans un cadre réaliste, "The Troll Hunter" faisait clairement partie du haut du panier de la vague des found-footages de l'époque en se distinguant par son ton finalement assez unique dans la masse plus qu'aléatoirement qualitatif de ce sous-genre le temps a passé, l'excellent souvenir de cette randonnée norvégienne et de la rencontre avec ces créatures fantastiques a commencé peu à peu à s'estomper de nos esprits tout comme le nom d'André puis, en cette année 2017, a déboulé d'un peu nulle part "The Jane Doe Identity", la première expérience américaine de ce réalisateur qui signe donc son retour tardif avec un pitch simple, efficace et forcément intriguant un père Brian Cox et son fils Emile Hirsh, tous deux médecins-légistes, se retrouvent confrontés à des événements surnaturels suite à l'autopsie du corps d'une mystérieuse aussi roublard, le norvégien va encore pratiquement réussir son coup en appliquant une formule similaire sur certains aspects à "The Troll Hunter" l'humour en moins à une idée de départ basée sur un mystère est cette Jane Doe dont l'avancée de l'autopsie engendre autant de phénomènes étranges que d'énigmes pour ces deux médecins ? Voilà la grande question de ce début de mystère a beau vite s'éventer sur sa véritable nature quelques indices hélas trop appuyés, peu importe, le tour de force d'Øvredal est -sans trop en dire- d'extirper à nouveau des éléments d'un certain folklore, en l'occurence américain, pour nous les présenter d'un point de vue inédit et somme toute effet, si l'aspect réaliste de "The Troll Hunter" était ancré dans sa forme de documenteur, il s'incarne ici dans le regard scientifique que portent les deux protagonistes principaux sur les événements auxquels ils sont confrontés. Tout comme les premiers instants du film, ils avancent dans leur examen étape par étape, avec une rigueur établie, un sérieux et un sentiment d'habitude méthodique renforcée par l'esthétique ancienne, figée, de cette morgue familiale transmise de génération en génération mais les questions que posent les découvertes faites sur ce corps désagrègent peu à peu leurs certitudes jusqu'à les faire perdre pied dans l'irrationnalité la plus totale. L'aura étouffante du cadavre déteint petit à petit sur l'ambiance, la tension monte de la manière la plus habile qu'il soit, les manifestations paranormales gagnent en puissance on y retrouve d'ailleurs encore l'idée d'un ancrage archaïque avec l'utilisation détournée de la fameuse clochette et parviennent toujours à créer un certain sentiment d'inattendu grâce à leurs multiples formes. Quelques jumpscares "obligatoires" viennent noircir le tableau ici et là mais André Øvredal fait preuve d'une telle maîtrise à ménager les rebondissements des deux premiers tiers de son récit imaginez un croupier qui vous distribuerait toujours les bonnes cartes au bon moment qu'on lui pardonne aisément ces petits écarts, d'autant que le tout est visuellement très bien emballé, le film tirant parfaitement parti de chacun des décors de son huis-clos pour amplifier le sentiment d' sera par contre un peu moins transigeant sur les facilités de la dernière partie qui voit le relationnel familial, élément scénaristique le plus faible depuis le début par son classicisme malgré le jeu des comédiens, formidable, devenir la clé de voûte directrice du dénouement. Après un twist annexe prévisible, le film donnera l'impression d'avoir envie de vite en finir pour rester sur de bonnes une scène de confession père/fils obligatoire et quelques répétitions sur la résolution du principal mystère l'idée pourtant passionnante d'une peur humaine fondatrice d'"autre chose" est, elle, hélas survolée, la conclusion n'apportera hélas jamais la même satisfaction que l'on avait ressenti jusque-là. On se raccrochera alors aux détails apportés par l'épilogue nous rappelant tous les meilleurs moments de cette nuit de cauchemar passée à la morgue...Envie de passer une nuit de folie à découper un cadavre pas comme les autres ? "The Jane Doe Identity" est fait pour vous et tient presque toutes ses promesses ! Il signe, en plus, le retour d'un réalisateur très malin dont on espère ne pas attendre le prochain film pendant sept longues années... Un excellent film d épouvante ! Le suspense est à son comble jusqu'à la fin aussi bien d'un point de vue de l histoire que du stress. Une histoire originale et très bien ficelée. Je conseille fortement !!! Bon, il faut se forcer pour écrire plus de quelques lignes sur "The Autopsy of Jane Doe" - un meilleur titre que la ridicule transposition "française", vu que le film raconte en effet l'autopsie d'un cadavre féminin inconnu -, parce qu'on n'a a priori pas grand chose d'autre à dire que petit film d'horreur sympathique mais pas très cohérent, qui commence plutôt sérieusement - et plutôt bien - sous forme d'intrigue policière assez fascinante, avant de sombrer peu à peu dans le n'importe quoi à coup d'accumulation de clichés et de "jump scares", comme disent les djeunes, par trop faciles. Voilà, on ne s'ennuie quand même pas trop, et ce d'autant que, étonnamment, il y a l'excellent Brian Cox à l'écran, et l'ex-jeune premier mignon Emile Hitsch, un peu moins excellent, lui. Que dire d'autre ? Qu'on sait bien que le cinéma fantastique fait du sur-place en attendant une nouvelle génération de talents... qui tarde à venir, et que dans ce contexte, "The Jane Doe Identity" a au moins le mérite d'essayer de raconter quelque chose d'original. Et puis voilà, il n'y a pas grand chose à rajouter. Ou plutôt si j'aurais dû retourner voir "Get Out". Ça, au moins, c'est du fantastique, mais c'est aussi du cinéma, qui plus est qui nous parle de notre Monde. Les films d'horreur ont tendance à vous émoustiller adolescent, entre la volonté de se faire peur et la tentative de rapprochement avec la charmante demoiselle avec laquelle vous regarder le film. Adulte, vous n'avez plus grand chose à vous prouver, et assez de la vie quotidienne pour vous faire peur tous les jours avec votre dulcinée. Voilà pourquoi personnellement, si je donne encore dans les thrillers, je ne regarde quasiment plus jamais de films d'horreur. Quelque chose m'a cependant attiré dans ce film, et j'ai voulu faire confiance aux bonnes notes que j'ai pu voir ici et là, sans lire une seule critique ni regarder la bande-annonce. Grand bien m'en a pris. Contrairement à la plupart des films du genre, la réalisation et la lumière sont ici parfaitement maîtrisés. D'excellents plans, une image de qualité, une lumière parfaite, sont mis en valeur par un excellent montage qui donne une très bonne qualité technique au film. Le scénario est plutôt bien trouvé, et l'on découvre petit à petit les secrets de cette belle inconnue. Je ne connais pas le métier de médecin-légiste, mais les scènes ont vraiment l'air très réalistes, et pour un novice on s'y croirait vraiment. Les acteurs sont excellents, on connaissait Brian Cox pour son interprétation dans la série des Jason Bourne, et Bravehart. Emile Hirsch quant à lui avait eu le premier rôle d' "Into the wild" et jouait dans l'excellent "lone survivor". Les deux forment un duo père / fils excellent et très crédible. Le réalisateur norvégien a déjà sévit dans le genre, avec le très mauvais à mes yeux film "The Troll hunter'. Il prouve à l'évidence qu'il peut aussi exceller, ce film étant pour moi une vraie réussite, qui vous réservera à coup sûr quelques frissons ! " the jane doe identity " est un film d'horreur qui m'a plutôt déçu. En effet j'ai trouvé l'histoire convenu plusieurs questions reste sans réponses et je n'ai guere sursaute durant la projection cependant j'ai trouvé intéressant de suivre jusqu'au dénouement ce qu'il est arrivé à " jane doe". Je lui met peut-être une note un poil trop généreuse, mais bon sang, ça faisait longtemps que je n'avais pas vu un aussi bon film d'horreur, un film qui m'a vraiment fait peur ! L'histoire apparaît tout d'abord assez simple un père et son fils vont faire une autopsie sur un cadavre parfaitement intact, retrouvé sur une scène de massacre. Puis des évènements vont se produire. Mais le film est super bien maitrisé la mise en scène, les plans, l'atmosphère lugubre et froide dans un funérarium assez moderne, jouant sur ce contraste... Le scénario prend le temps malgré la courte durée du film on assiste d'abord à une autopsie autant intéressante qu'effrayante, point par point ; puis la tension monte de plus en plus et c'est là où les codes de l'horreur se font une place dans l'histoire. Ce que j'ai apprécié, c'est qu'on nous en montre ni trop, ni peu, juste ce qu'il faut avec une véritable ambiance des ombres, des sons de clochette vous comprendrez, des apparitions furtives et lentes à la fois... bref tout ce qui fait froid dans le dos. Il y a un petit ralenti dans l'histoire, mais qui heureusement s'estompe rapidement jusqu'à un final satisfaisant. Je vous le conseille vivement, sûrement un des meilleurs films d'horreur de cette année ! Un film d'horreur plutôt bon dans l'ensemble. J'ai beaucoup aimé la première partie du film, l'autopsie du corps est vraiment morbide et met vraiment mal à l'aise. La tension est très bien gérée et le suspense monte au fur et à mesure à la découverte des choses inquiétantes présent dans ce fameux corps de Jane Doe. Malheureusement la deuxième partie du film est très bancal et convenue dans le sens où ça devient un banal film d'horreur avec des jump scare prévisibles et où l'on devine facile ce qui va se passer. De plus la fin est carrément bâclée. Malgré ces déconvenues, j'ai passé un bon moment et le film reste assez efficace dans le genre malgré quelques faiblesses. Pas très original ce Jane Doe Identity », mais franchement, est-ce vraiment un problème ? En tout cas, pour moi, pendant toute la première moitié, ça n’en a pas vraiment été un. C’est vrai qu’on voit très rapidement où il veut en venir ce film, si bien que le mystère qu’il entretient longuement semble une démarche bien illusoire. Idem pour le décor et les petits éléments glissés ça et là dont on sait pertinemment comment ils vont être réutilisés par la suite les cadavres qu’on expose un à un, la petite clochette dont on explique l’utilité, le chat qui se balade dans les aérations, etc… . Malgré tout, j’avoue que je n’arrive pas à en vouloir à ce film sur ce point-là tant il s’affiche très rapidement comme un bon vieux film de genre qui entend juste jouer un peu avec les codes, sans forcément les réinventer. Et donc voilà, comme dit un peu plus haut, je trouve que globalement ça fait le boulot sur l’ensemble de la première moitié. Sans être ultra-inventive la mise en scène ne sombre pas non plus dans l’excès. L’huis-clos est plutôt bien exploité. Le duo Cox-Hirsch fait le nécessaire en termes d’affect… Et puis il y a ensuite la deuxième moitié où là le film commence à patiner... Clairement, on sent que les deux scénaristes n’ont plus d’idées et qu’ils s’efforcent de claquer différentes péripéties pour rallonger la sauce… Alors on va dans le bureau, on est enfermé, attaqué, puis on ressort du bureau pour aller au bloc, où on s’enferme à nouveau, etc… Enfin bon… Et puis finalement, après pas mal d’errances et de scènes attendues alignées, sur le dernier tiers, le film craque totalement et sombre carrément dans le je-t’explique-pas-parce-que-c’est-comme-ça. » D’un seul coup, alors qu’Emile Hirsch vient quand même de voir mourir sa girlfriend, voilà qu’il a soudainement une révélation. Elle ne nous tue pas alors qu’elle pourrait. Il y a forcément un truc à faire ! » Ce truc à faire, c’est… lui ouvrir le crâne. Et là je me suis dit OK… Pourquoi maintenant ? Pourquoi que maintenant ? » En ouvrant le crâne, on se rend compte que le cerveau est en parfait état… Du coup, au lieu de la fracasser, on en prend qu’un petit échantillon et on referme délicatement le crâne afin de faciliter l’avènement des péripéties suivantes… Là, Brian Cox a soudainement l’illumination et comprend en seulement cinq minutes ce qui est arrivé à la fameuse Jane Doe… Et alors qu’une heure plus tôt il voulait encore se rattacher à tout ce qu’il y avait de rationnel, voilà que le gars, après avoir lu un passage de la Bible, arrive à dérouler tout le processus d’une procès en sorcellerie qui aurait mal tourné. Franchement, chapeau, parce que c’était quand même vachement précis ! Bref, j’avoue que le déroulement final m’a quand même pas mal laissé sur la touche. Moins soucieux de sa logique, moins soigné dans ses effets, plus archétypal. Le film va même jusqu’à se conclure sur un dernier plan un peu ridicule, comme s’il voulait nous prendre par surprise alors que – bon – on l’avait un peu vu venir à des milliers de kilomètres ce coup-là… En somme, voilà un film qui n’a pas su fournir un travail suffisamment riche pour qu’au moins, il puisse intégrer les rangs de ces petits films de genre pas originaux mais au moins bien foutus et sympas. Autant dire donc que cette Jane Doe » risque vite de sombrer dans l’anonymat… Bonne idée avec l'autopsie, bonne ambiance générale. Après c'est plutôt décevant, effets faciles musique, obscurité, pas très effrayant, scénario moyen, rien de bien nouveau et réalisation en dents de scie. The Jane Doe Identity est un film d'horreur qui commence un peu comme un thriller, c'est à dire avec plusieurs morts inexpliqués. La première fois que l'on voit Jane Doe, elle est dans la même maison que les autres morts, partiellement enterrée dans la cave. Les policiers connaissent toutes les victimes, sauf elle. Elle part donc chez le légiste pour être identifiée et pour comprendre comment elle est à ce moment là, après seulement 5 minutes de films, lorsque Jane Doe arrive chez les légistes, que le film commence et que la peur s'installe. C'est un huis clos, c'est oppressant, c'est terrifiant et la peur ne recule jamais. L'histoire qui est révélée est surnaturelle, mais se tient tellement bien qu'on y croit. L'histoire de Jane Doe commence bien avant qu'elle ne se retrouve dans cette morgue et continuera bien après et si on se laisse si facilement prendre par la peur, c'est parce qu'elle est infiniment bien racontée, par des acteurs aussi bons les unes que les autres et par une réalisation sais déjà que ce sera l'un des films les plus effrayants de l'année 2017. Bonne trouille à tous ! voilà c ' est effectivement pas très intéressant. Les comédiens font ce qu' ils peuvent mais ne tirent pas de l ' ennui de la projection . Une bonne idée ne fait pas un bon film celui ci n ' a pas d ' intérêt . Le scénario apporte aucune réponse sauf à la toute fin . Les meilleurs films de tous les temps Meilleurs films Meilleurs films selon la presse Dernierné des quartiers de Metz, le quartier de l’amphithéâtre, situé derrière la gare, est en plein essor. Beaucoup y viennent faire leurs emplettes ou 19 novembre 2012 1 19 /11 /novembre /2012 2255 Les Années Quatre-Vingt Canzone française – Les Années Quatre-Vingt – Marco Valdo – 2012 Histoires d'Allemagne 84 An de Grass 85 Au travers du kaléidoscope de Günter Grass Mon Siècle » Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également et de ses traducteurs français Claude Porcell et Bernard Lortholary. Les années quatre-vingt ? Les années quatre-vingt, oui, mais de quel siècle ? Sans doute du siècle dernier, je suppose, car tu ne l'as même pas précisé. Qu'y a-t-il à dire sur ces années quatre-vingt ? Car souviens-toi, il y eut parmi les années quatre-vingt quatre-vingt neuf, c'était au dix-huitième siècle – après Zéro, vu que le premier siècle se compte de Zéro à quatre-vingt dix-neuf ou à nonante-neuf, c'est selon et que donc, de cent à deux cents, on parle du deuxième siècle... et ainsi de suite. Donc, le quatre-vingt neuf du dix-huitième siècle se note 1789... C'était l'année de La Révolution. Tu sais celle avec les enfants de la patrie, du jour de gloire, de l'étendard sanglant de la tyrannie, etc. Ou alors, quatre-vingt treize... C'est toujours le dix-huitième siècle et encore plus révolutionnaire... 1793. Aux armes, citoyens ! Et tout le saint-frusquin. Si tu m'avais dit soixante-dix... Là, c'était autre chose, on était dans le dix-neuvième siècle et on s'entretuait joyeusement du côté de Sedan entre autres et bien entendu, on pense à La Commune. Tout comme l'An Quarante lui se situe dans le vingtième siècle et c'est lui qui rappelle la plus grande boucherie de tous les temps. C'est à l'évidence une affaire lointaine... On a connu bien d'autres guerres depuis. Deux ou trois remarques à propos de tes propos, Lucien l'âne mon ami. J'apprécie beaucoup que tu comptes – enfin ! – à partir de Zéro. Qui était Zéro, en fait, on s'en tape. Mais la chose est – surtout si Zéro n'est rien et de surcroît, rien d'autre que lui-même, le point de départ absolu – donc, la chose est plus objective et plus solidement fixée que lorsqu'on accroche le temps à un personnage à l'existence et aux allures incertaines. Entre nous soit dit, et j'espère bien que tu n'iras pas le répéter urbi et orbi, ce gars-là devait être sérieusement atteint pour se prendre pour le tiers d'un Dieu... Ah, Ah, dit Lucien l'âne, comme tu vois, il n'était pas la moitié d'un... Bref, il a raconté n'importe quoi... Tandis que Zéro lui ne dit rien, ne revendique rien et se contente de fixer le point de référence... Ensuite, pour ce qui concerne l'an quarante et la Guerre de Quarante qui s'ensuivit et les autres guerres qu'on aurait connues depuis, je reste persuadé qu'on ne l'a jamais terminée et qu'elle continue aujourd’hui encore... L'An Quarante est toujours d'actualité. Dans la version militaire, cette guerre se déplace sur le corps de la Terre ; elle disparaît ici, elle reparaît là-bas... Elle court, elle court... Mais c'est toujours la même, c'est la Guerre de Cent Mille Ans que les riches font aux pauvres afin d'en extraire plus de profits encore, d'accroître leur domination, d'étendre leur emprise, de faire prospérer leurs richesses et d'assouvir leurs plus stupides caprices. Elle est tirée par ces deux pénibles et insupportables haridelles que sont Cupidité et Avidité. Oui, sans doute, je ne peux pas les piffer celles-là. Mais finalement, de quelles années quatre-vingt s'agit-il ?, demande Lucien l'âne en raclant le sol d'un sabot exigeant. Ce sont bien évidemment, celles du siècle dernier ; quant à la chanson elle-même, elle concerne une des années quatre-vingt, l'An de Grass quatre-vingt cinq. Cette année 1985 est décrite par une Mamie bien des années plus tard... De ses souvenirs, il résulte que pour elle, il n'y avait que les feuilletons et la télévision... Et ce n'est pas faux... les humains en sont encore là... Certes, certes, Lucien l'âne mon ami. Pour la canzone, tu te souviens qu'habituellement dans ces Histoires d’Allemagne, chacune est fondée sur le récit d'un narrateur. Cette fois, on a droit à une double narratrice la Mamie en question et sa petite fille qui l'interroge en vue de préparer son mémoire de fin d’études. À l’époque, chez nous, on appelait le niveau d'études, une licence ; mais Europe oblige, c'est de venu une maîtrise et pour ceux qui se piquent d'anglomanie galopante, un mastère, mot qui, soit dit en passant, en rappelle furieusement un autre water abréviation de water-closed que Queneau avait orthographié Ouatère. On ne saurait l'ignorer, dit l'âne Lucien en hoquetant de rire. Donc, la petite demoiselle ici, ma chérie » rencontre sa grand-mère ici, Mamie » pour obtenir quelques éléments pour son mémoire intitulé Le quotidien des seniors ». Et ce qui en ressort, tu le verras dans la chanson... Ces braves vieilles finissent leur vie devant la télévision en avalant force feuilletons et en subissant l'interminable va et vient des balles de tennis. Bref, vu du côté des seniors, le progrès faisait déjà rage. On s'ennuyait ferme dans les appartements et les pavillons de banlieue. La Passion de Madame Scholz Ça n'a pas changé... C'est sûr... C'est dur d'être des seniors dans un monde malade de sa jeunesse, atteint de jeunisme chronique, en quelque sorte et de plus, envahit par les téléviseurs. En somme, quand on est remisé au rang des seniors, arrivé à un certain moment, on s'entraîne au rôle futur de macchabée, celui-là même auquel Tonton Georges fait allusion dans les Quatz'Arts. [[39144]], celui de la chanson connue de tous les étudiants...de France, de Navarre et d'ailleurs. Et, dit Lucien l'âne secoué par un fou-rire mal dissimulé sous son poil noir luisant, moi aussi, je la connais cette chanson et je vais même te la chantonner... Dans un amphithéâtre Dans un amphithéâtre Dans un amphithéâtre -phithéâtre -phithéâtre -phithéâtre Tsoin-tsoin. Il y avait un macchabée Il y avait un macchabée Il y avait un macchabée macchabée macchabée macchabée tsoin-tsoin Ce macchabée disait Ce macchabée disait Ce macchabée disait Il disait Il disait Il disait tsoin-tsoin Ah! ce qu'on s'emmerde ici Ah! ce qu'on s'emmerde ici Ah! ce qu'on s'emmerde ici -merde ici -merde ici -merde ici tsoin-tsoin » Bref, dit Marco Valdo de l'air le plus docte qui soit, les vieux s'entraînent à s'emmerder pour l’éternité, sauf évidemment si leur karma leur offre mille résurrections sous les formes les plus diverses... En clown, en matou ou en bonobo, par exemple. Et même, en âne...On en connaît à qui telle résurrection est arrivée. Mais que tout ceci ne nous empêche pas de perpétuer notre tâche qui, je le rappelle, est de tisser, tisser, tisser encore et toujours le linceul de ce vieux monde emmerdant, étouffant, télévisuel et pour tout dire, feuilletonesque et cacochyme. Heureusement ! Ainsi Parlaient Marco Valdo et Lucien Lane Dis-moi, dis-moi, dis-moi, Mamie, Oui, oui, oui, quoi, ma chérie ? Pour mes études, je dois faire un mémoire Et je compte beaucoup sur ta mémoire Que buvait grand-papa ? De la bière ou du vin ? Il avait fait la guerre. Où était-il en quarante-trois ? Comment c'était dans les années quatre-vingt ? Les jeunes avaient-ils un emploi ? Allaient-ils longtemps soldats ? Les gens rencontraient-ils le bonheur ? Y avait-il autant de chômeurs ? On avait une auto, des congés, mais pas d'ordinateur. Dis-moi, dis-moi, dis-moi, Mamie, Oui, oui, oui, quoi, ma chérie ? S'il te plaît, raconte-moi ton histoire J'ai vraiment envie de savoir Ô Mamie, n'était-ce pas mieux autrefois ? Tu sais, ma chérie, Grand-Père n’était plus là Je travaillais à mi-temps pour finir le mois Et mes jambes n'en voulaient plus trop déjà Fini les grandes ballades, finies les courses Le shopping et tout le tralala Mamie, Mamie, les banques, la bourse ? Celles-là, ma chérie, dictaient déjà la loi. Dis-moi, dis-moi, dis-moi, Mamie, Oui, oui, oui, quoi, ma chérie ? Et les journées, tu faisais quoi ? Avec madame Scholz, la voisine On regardait la télé dans la cuisine On se passionnait pour les feuilletons Que pouvait-on faire d'autre, dis-moi ? Qu'aurait-on fait sans la télévision ? On regardait le tennis, je n'aimais pas ça Ce va et vient, pendant des heures parfois. Madame Scholz, Boris et Steffi, c'était sa passion. Et puis, il y a eu la Glasnost qui venait du froid. Published by Marco Valdo - dans Marco Valdo 7vaYH.